Nos 50 films préférés de 2025

C’est la fin de l’année et, comme la tradition le veut, on a recensé les films qu’on a le plus aimés au cours des douze derniers mois. Dans ce top des meilleurs films de 2025, on retrouve pêle-mêle les bangers de Hafsia Herzi, Paul Thomas Anderson, Brady Corbet, Kiyoshi Kurosawa, Alexe Poukine, Kristen Stewart, Kleber Mendonça Filho… Sans plus de suspens, voici la liste complète de nos coups de cœurs, triés sans ordre de préférence, mais par ordre alphabétique.


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L'Accident de piano © Diaphana Distribution

L’Accident de piano de Quentin Dupieux

Retrouvailles au sommet entre Adèle Exarchopoulos et Quentin Dupieux dans cette fable satirique qui suit les mésaventures de Magalie, influenceuse star des réseaux, insensible à la douleur. Réfugiée à la montagne avec son assistant débordé (Jérôme Commandeur), Magalie est victime d’un chantage de la part d’une journaliste (Sandrine Kiberlain) qui menace de divulguer la vérité sur un grave accident survenu lors du tournage d’une vidéo. Le début d’un jeu de carnage délicieux entre fans obsessionnels et vicieux journalistes.

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© mk2 Films

L’Agent secret de Kleber Mendonça Filho

1977. Brésil. Marcelo (Wagner Moura), quadragénaire fuyant un passé trouble, quitte São Paulo pour rejoindre la petite ville de Recife, au nord du pays alors gangrené par la dictature militaire. C’est là qu’il apprend que des tueurs à gages sont à ses trousses. Le talentueux Kleber Mendonça Filho (Les Bruits de Recife, Bacurau) déploie là un mélange des genres impressionnant – thriller historique, récit d’espionnage, film d’épouvante – qui donne à voir la complexité d’une époque et d’un monde au bord de la folie. Tout simplement brillant.

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© Arizona Distribution

L’Aventura de Sophie Letourneur

La géniale cinéaste et actrice Sophie Letourneur retrouve Philippe Katerine après le déjà très sensible Voyages en Italie. Dans ce nouvel opus, deuxième partie d’un futur triptyque, le double fictionnel de la réalisatrice, son mari Jean-Phi et leurs deux enfants se lancent dans un road-trip en Sardaigne. Reconstituant des archives sonores et visuelles qu’elle a tournées dans sa vraie vie, la cinéaste signe un feel-good movie aussi jouissif que singulier.

Une bataille après l'autre
© Warner Bros

Une bataille après l’autre de Paul Thomas Anderson

Après son tendre teen movie Licorice Pizza, Paul Thomas Anderson braque cette fois sa caméra sur Bob Ferguson (Leonardo DiCaprio), ancien révolutionnaire à côté de la plaque qui doit reprendre du service pour retrouver sa fille kidnappée. Un long-métrage hybride, à la fois pamphlet politique et road-movie fou, du côté de ceux qui – même un peu dépassés par l’actualité– se battent encore et toujours contre l’obscurantisme.

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© Art House

Black Box Diaries de Shiori Ito

Dans ce documentaire sidérant, la journaliste et cinéaste Shiori Itō, victime de viol en 2015 de la part de Noriyuki Yamaguchi (directeur du bureau de Washington de la chaîne TBS), retrace sa propre affaire et expose le tabou du viol dans une société japonaise conservatrice. Un geste fort dans un pays où, par peur des représailles, seulement 4 % des femmes victimes d’agressions sexuelles portent plainte. Depuis, la loi sur la définition légale du viol dans le pays a été révisée et réécrite.

The Brutalits
© Universal Pictures

The Brutalist de Brady Corbet

Fresque magistrale à la cinégénie éblouissante, le film de Brady Corbet retrace le parcours de László Tóth (incroyable Adrien Brody), un architecte hongrois rescapé des camps de concentration et réfugié aux États-Unis, où un riche industriel (Guy Pearce) lui commande la construction d’un bâtiment excentrique.  Le cinéaste s’autorise une amplitude – plus de trois heures – de plus en plus rare au cinéma. Un temps qui n’est pas seulement celui du film, mais de ce qu’on y filme, à savoir l’édification de ce fameux bâtiment comme la lente dérive d’une relation de pouvoir. C’est dire que la construction imposée Toth prend vite des proportions surréalistes, condamnant l’architecte comme on a condamné Sisyphe. Un châtiment sans doute pas étranger à Brady Corbet, dont les films traduisent une obstination perfectionniste, un désir de grandeur qu’on croirait tout droit sortis de l’univers kubrickien. 

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© Pathé

La Chambre d’à côté de Pedro Almodóvar

Reparti de Venise avec le Lion d’or l’année dernière, le premier long-métrage anglophone de l’Espagnol Pedro Almodóvar met en lumière une grande histoire de deuil et d’amitié. À travers les personnages incarnés par les impressionnantes Tilda Swinton et Julianne Moore, qui campent respectivement une ancienne journaliste atteinte d’un cancer et sa vieille amie venue l’aider à passer ses derniers jours dans une maison reculée,Almodóvar transcende son dispositif jusqu’à atteindre la grâce.

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© Nikkatsu

Chime et Cloud de Kiyoshi Kurosawa

Deux films signés Kiyoshi Kurosawa pour le prix d’un. Un moyen métrage, Chime, et un long, Cloud, sortis à une semaine d’intervalle, qui hantent encore nos esprits tant le monde que déploie le cinéaste japonais dans chacun d’eux résonne avec une horreur quotidienne et banale (les couteaux de cuisine n’ont jamais paru aussi terrifiants).

The Chronology of Water
© Les Films du Losange

The Chronology of Water de Kristen Stewart

Film sensoriel, voire carrément viscéral, le premier long métrage de l’actrice Kristen Stewart est une expérience de cinéma. En adaptant les mémoires de l’ancienne nageuse et écrivaine Lydia Yuknavitch, la jeune cinéaste opère un tour de force en retranscrivant fidèlement la crudité du livre, récit de la trajectoire abîmée d’une écrivaine en devenir, gangrenée par la violence et les addictions.

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© Diaphana

Deux sœurs de Mike Leigh

Les deux sœurs Pansy (Marianne Jean-Baptiste) et Chantelle (Michelle Austin) sont deux personnages que tout oppose. La première est une mère au foyer acariâtre et méprisante, souffrant de douleurs chroniques, tandis que l’autre, coiffeuse, est une femme lumineuse et épanouie. Un double portrait drôle et déchirant sur ce qu’aimer veut dire et nous fait. Autrement dit, du pur Mike Leigh, grand humaniste du cinéma britannique.

Ballerina
© Metropolitan FilmExport

De l’univers de John Wick : Ballerina de Len Wiseman
Une ancienne ballerine qui a suivi une formation de tueuse part venger son père, éliminant les assassins qui l’ont tué. Sur le papier, ce revenge movie de la saga John Wick ne laisse présager rien de fou-fou, mais on a été fascinés par ses scènes d’action inventives et spectaculaires (on a aussi souri devant des chorégraphies totalement irréalistes, il faut l’admettre). Ana de Armas, qui campe l’héroïne avec panache, fait feu de tout bois pour arriver à son but. Et ça, ça force l’admiration.

Des preuves damour
© Apsara Films

Des preuves d’amour d’Alice Douard

Avec ce premier long métrage inspiré de son vécu, la cinéaste Alice Douard vise juste. Elle raconte l’histoire d’un couple de femmes (géniales Ella Rumpf et Monia Chokri) qui attend un enfant par PMA, et leur lutte pour obtenir la reconnaissance légale de la maternité de l’une des deux, qui ne porte pas le bébé. Sans pathos, la réalisatrice propose une fiction queer pleine de densité, à la fois aérienne, drôle et profonde. 

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© Haut et Court

Dossier 137 de Dominik Moll

Après le polar hanté La Nuit du 12 (2022), le cinéaste Dominik Moll a repris du service avec ce brillant film policier. Il y suit une enquêtrice de l’IGPN (Léa Drucker, toujours aussi forte) qui, quelques mois après le début de la crise des « Gilets jaunes », se voit confier l’affaire d’un manifestant blessé, et se retrouve prise dans les filets d’un cas plus trouble qu’il n’y paraît. Sans manichéisme, le film expose le gouffre qui sépare citoyens et policiers, et interroge le rôle des images dans les récits médiatiques et politiques.

L'engloutie
© Condor Distribution

L’Engloutie de Louise Hémon

Dans un petit village des Hautes-Alpes, à l’aube du XXe siècle, une nouvelle institutrice (Galatéa Bellugi) confronte son savoir aux légendes locales, ses désirs à l’ordre établi. Dans L’Engloutie, son magnifique premier long métrage, Louise Hémon filme la montagne comme un théâtre de vertiges – temporels, sensuels, politiques. À découvrir absolument en salles le 24 décembre prochain !

Les enfants vont bien
© Studio Canal – Chi-Fou-Mi Productions

Les Enfants vont bien de Nathan Ambrosioni

Vous l’aurez deviné avec notre dernier numéro : on est tombé raide dingue du nouveau film de Nathan Ambrosioni (Toni en famille), 26 ans et déjà plein de talent. Le cinéaste y raconte l’histoire de Suzanne (Juliette Armanet), qui laisse soudain ses enfants à sa sœur, Jeanne (Camille Cottin), et disparaît sans explications. Un film aussi tendre que déchirant sur la manière dont ceux qui restent tentent de faire famille.

Enzo
© Les Films de Pierre

Enzo de Laurent Cantet réalisé par Robin Campilllo

À La Ciotat, Enzo (la révélation Eloy Pohu), 16 ans, apprenti maçon peu doué, cherche à rompre avec sa famille bourgeoise et la pression d’un père inquiet. Le film suit sa révolte, ses blessures et ses désirs, sous le décor ensoleillée d’une ville azuréenne où l’architecture révèle la fracture entre classes sociales. Prévu par Laurent Cantet et finalement réalisé par son ami Robin Campillo après la disparition du cinéaste en avril 2024, ce drame subtil mêle sensualité et mystère, notamment à travers la fascination d’Enzo pour Vlad, ouvrier ukrainien exilé.

L'épreuve du feu
© Paname Distribution

L’Épreuve du feu d’Aurélien Peyre

Hugo (Félix Lefebvre), 19 ans, passe l’été sur une île avec sa copine Queen (Anja Verderosa). Leur couple, différent, choque – bientôt, les regards et le mépris social pèsent sur eux… Un premier long d’une infinie sensibilité – qui emprunte aussi bien à Jacques Rozier qu’à la téléréalité – sur un jeune couple flamboyant, trop beau et trop grand pour cadrer avec le conformisme de leur groupe d’amis de vacances.

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© Gaumont

L’Étranger de François Ozon

C’était un pari dangereux et il est à notre sens réussi. François Ozon adapte le célèbre texte de Camus avec une radicalité sensorielle, faisant de Meursault (Benjamin Voisin) un être absent à lui-même, cerné par le soleil et la mort. Captant un être en surface, tout en mutisme et lenteur, le film explore sa désaffection, ses relations complexes et la conscience tragique de l’absurde. 

Les Feux Sauvages de Jia Zhang-ke
© Ad Vitam

Les Feux sauvages de Jia Zhang-ke

Dans son dernier film, le grand Jia Zhang-ke (A Touch of Sin, Les Éternels) se livre à une archéologie mélancolique de sa propre filmographie, assemblant archives et fragments pour explorer la Chine en transition. À travers l’histoire d’un couple séparé qui se retrouve, l’impériale Zhao Tao traverse un mélodrame minimaliste où les ellipses, variations de cadre et textures soulignent le temps qui passe et la force du changement social et économique qui frappe le pays.

Les filles desir
© Zinc

Les Filles désir de Princïa Car

Marseille pendant l’été. Un groupe d’amis de la cité phocéenne se retrouve bouleversé par le retour de Carmen (Lou Anna Hamon), une amie d’enfance et ex-prostituée. À travers cette bande de jeunes taraudée par les questions de l’amour et de la sexualité, la cinéaste française Prïncia Car interroge la place des jeunes femmes aujourd’hui, leurs désirs et ceux que les autres projettent sur elles. Un fabuleux film de troupe, coécrit avec ses acteurs, pure essence d’une jeunesse en quête d’identité.

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© UFO Distribution

Flow de Gints Zilbalodis

Un chat solitaire, déambulant à travers la nature, se retrouve surpris par une soudaine montée des eaux qui le condamne à devoir partager une arche de fortune avec d’autres animaux… Nommée aux Oscars et récompensée du César du meilleur film d’animation cette année, l’œuvre du Letton Gints Zilbalodis s’oppose à l’anthropomorphisme habituel de ce genre de récit pour laisser place à une errance silencieuse véritablement bouleversante.

Je n’avais que le néant – “Shoah” par Lanzmann de Guillaume Ribot © USHMM et YAD VASHEM - Collection SHOAH de Claude Lanzmann
© mk2 Films

Je n’avais que le néant – Shoah par Lanzmann de Guillaume Ribot Romain

En 2013, Shoah, le film-enquête de Claude Lanzmann, sorti en 1985, entrait au registre de la Mémoire du monde de l’Unesco. On sait peu quelle aventure éprouvante fut le tour-nage du film, étalé sur cinq ans (de 1976 à 1981), durant lesquels Lanzmann a traqué, tel un détective, les témoins de ce génocide. Dans un film aux airs de road-movie, intitulé « Je n’avais que le néant – Shoah par Lanzmann », le réalisateur et photographe Guillaume Ribot retrace l’élaboration de Shoah, en s’appuyant sur le livre « Le Lièvre de Patagonie » de Claude Lanzmann, et en puisant dans les 220 heures de rushes du tournage non retenus dans le montage final, conservés à l’United States Holocaust Museum de Washington.

Je suis toujours là de Walter Salles
© Studio Canal

Je suis toujours là de Walter Salles

1971. Pour la famille Paiva, qui réside à Rio, le quotidien n’a plus rien de l’insouciance d’autrefois. Depuis que la dictature militaire régit le pays, la liberté d’opinion est en danger. Ancien opposant politique, le père est bientôt enlevé par le régime et sa femme va tout faire pour retrouver sa trace…. Walter Salles retrace ici l’histoire vraie de l’ex-député de gauche Rubens Paiva en tournant sa caméra du côté de son épouse Eunice, véritable figure de courage et de résilience magistralement incarnée par Fernanda Torres. Cinéaste expérimenté de 68 ans, Salles (Central do Brasil, Carnets de voyage) traite frontalement l’époque de la dictature brésilienne – qui n’a pris fin qu’en 1985. Salles a lui-même fréquenté les Paiva à la fin des années 1960, et se livre d’abord à une mise en scène sensorielle qui restitue leur joie collective, avant que la sauvagerie de la dictature ne nous plonge dans une atmosphère de cauchemar.

Jeunesse, les Tourments
© Les Acacias

Jeunesse (Les Tourments) et Jeunesse (Retour au pays) de Wang Bing

Les deux derniers volets de la trilogie documentaire du maître chinois Wang Bing nous emmènent à nouveau dans les usines de Zhili, près de Shanghai, pour nous donner à voir l’intimité de ceux qui font tourner les géants de l’industrie textile. Un ensemble de portraits illuminés, matière d’une jeunesse pleine de vitalité et d’espoir, et une immersion tout entière dans un pays que Wang Bing ausculte, depuis plus de vingt ans déjà, avec autant de précision que d’humanité.

Kika
© Condor Distribution

Kika d’Alexe Poukine

Assistante sociale fauchée et veuve depuis peu, Kika (excellente Manon Clavel) ne parvient plus à joindre les deux bouts. Elle doit trouver un nouveau logement et rembourser les dettes accumulées pour l’enterrement de son conjoint. C’est alors qu’elle se lance dans le travail du sexe et devient dominatrice, le début d’une drôle d’histoire et d’un portrait touchant que la réalisatrice Alexe Poukine s’est appliquée à tenir loin du tragique et du misérabilisme.

Pamela Anderson dans The Last Showgirl © Zoey Grossman
© Sonny pictures

The Last Showgirl de Gia Coppola

Pamela Anderson est la last showgirl de Gia Coppola dans ce long métrage centré sur une danseuse de cabaret vieillissante dont le spectacle est soudainement arrêté. Un retour fracassant pour l’icône d’Alerte à Malibu, qui se réinvente ici grâce à un personnage poignant, aux côtés de seconds rôles ciselés incarnés par Dave Bautista et Jamie Lee Curtis. Du grand spectacle en forme de réflexion sur le temps qui passe et sur les rêves qu’on doit reléguer au passé.

Laurent dans le vent
© Mabel Films

Laurent dans le vent de Mattéo Eustachon, Léo Couture et Anton Balekdjian

Nouveau long métrage du trio de cinéastes derrière le singulier Mourir à Ibiza, le tout aussi unique Laurent dans le vent se présente comme un objet flottant, à l’image de son personnage principal, interprété par l’excellent Baptiste Perusat, qui débarque dans une station de ski hors saison et se laisse porter au gré du hasard et de ses rencontres. Un très beau film sur la dépression et la fluidité, qui aide à tromper la banalité.

left handed girl
© Le Pacte

Left Handed Girl de Shih-Ching Tsou

Réalisé par la productrice de Sean Baker, Left-Handed Girl nous immerge dans le quotidien d’une mère et de ses deux filles à Taipei, histoire teintée de secrets et de non-dits. Un film qui n’en reste pas moins malicieux et survolté, à l’image du rôle de la cadette, à la mignonnerie indéniable, qui nous emmène à toute allure dans les recoins de ce film aux airs d’immense terrain de jeu.

Mamie Sitting
© mk2 Cinémas

Mamie-sitting de Darren Thornton

Comment concilier sa vie d’adulte florissante et celles de ses parents vieillissants ? C’est la question que doit se poser Edward dans Mamie-Sitting, écrivain homosexuel qui se retrouve à devoir soudainement s’occuper de sa mère et de trois autres vieilles dames complètement barrées. On a été attrapé par le pouvoir tragicomique de ce film, qui réfléchit aussi habilement aux problématiques du vieillissement – et notamment du vieillir-gay.

Maman déchire d’Émilie Brisavoine
© JHR Films

Maman déchire d’Emilie Brisavoine

Dans Maman déchire, Émilie Brisavoine (déjà derrière l’emballant Pauline s’arrache) explore la personnalité punk et insaisissable de sa mère Meaud. Entre archives et expériences personnelles, le film, fragmentaire et en chantier, interroge la douleur, les secrets familiaux et l’irrésolu sans offrir de réponses, mais en célébrant l’acceptation des contradictions.

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© Pathé Films

Mektoub My Love : Canto Due d’Abdellatif Kechiche

Il aura fallu des années de suspense et d’infinies péripéties de production, montage et projection pour découvrir enfin le dernier volet de la trilogie Mektoub My Love, composée de Canto Uno en 2018 et Intermezzo, montré à Cannes en 2019 mais resté inédit en salles. Surprenant par sa mesure, Mektoub My Love : Canto Due offre à notre bande de jeunes sétois (toujours interprétée par les géniaux Shaïn Boumedine, Hafsia Herzi ou Ophélie Bau) une fin crépusculaire, loin de l’idéalisme sentimental des débuts, mais tout aussi fascinante. 

La Mer au loin de Saïd Hamich
© The Jokers Film

La Mer au loin de Saïd Hamich

Dense et sublime, La Mer au loin  raconte le parcours de Nour, un jeune Marocain venu s’installer clandestinement à Marseille au début des années 1990, dans un grand geste d’idéalisme. Avec un subtil équilibre entre dialogues pudiques et mise en scène libre, sentimentale et exaltée, cette fresque profonde étalée sur dix ans traite de l’exil sans misérabilisme, ni superficialité.

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© Warner Bros. France

Mickey 17 de Bong Joon-ho

Aussi ambitieux que surprenant, le dernier Bong Joon-ho (auteur du multirécompensé Parasite) suit Robert Pattinson, cobaye cloné pour coloniser une planète glacée et tester un vaccin, dans un futur violent et bizarroïde. Le cinéaste sud-coréen allie satire politique et comédie, tout en redonnant vie à des valeurs humanistes et à un cinéma SF à la fois malin et délirant.

Nino de Pauline Loquès (en Compétition à la Semaine de la critique)
© Jour2Fête

Nino de Pauline Loquès

Dans le beau Nino, Théodore Pellerin incarne un jeune homme frappé par un cancer. Pauline Loquès, qui signe ici son premier long métrage, capte sa sidération, sa fébrilité et ses élans dans un Paris vif, à la manière de Cléo de 5 à 7. Oscillant entre urgence et contemplation, le film explore subtilement ses relations et sa dérive intérieure. Transportant.

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© ARP Sélections

Nouvelle Vague de Richard Linklater

Dans ce savoureux hommage, Richard Linklater brosse un portrait jubilatoire de Jean-Luc Godard – il revisite le tournage du mythique À bout de souffle et dépeint le réalisateur de la Nouvelle Vague comme un jeune trublion aussi créatif qu’insupportable. Sans tomber dans l’hagiographie, le cinéaste texan explore le mouvement comme une aventure collective, pleine de chaos, tendresse et audace. 

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© Les Films du Losange

Oui de Nadav Lapid

Dans sa satire politique, Nadav Lapid (Synonymes, Le Genou d’Ahed) suit Y., musicien de jazz devenu agent de propagande après le 7-Octobre. Farce désespérée et comédie musicale provocante, le film traite de la servitude, d’une forme de résignation qui s’infuse dans la société israélienne, à travers une mise en scène cynique qui n’hésite pas à verser dans une vulgarité grotesque – avant de basculer, dans une deuxième partie, sur une partition plus inattendue et mélancolique.

La Pampa
© Tandem

La Pampa d’Antoine Chevrollier

C’est le début de l’été, les nuques suintent, la poussière défie la gravité sous le vrombissement des motos sur le terrain d’entraînement de supercross. Le premier film d’Antoine Chevrollier est bien plus qu’un énième coming-of-age baigné de lumières chaudes. Il brosse le portrait touchant de deux amis d’enfance (Jojo, interprété par le magnétique Amaury Foucher, et Willy, joué par le remarquable Sayyid El Alami) face à la masculinité toxique et au déterminisme social. Tout en levant un espoir : celui d’en sortir.

Peaches Goes Banana de Marie Losier
© Norte

Peaches Goes Bananas de Marie Losier

« Vaginoplasty, why do you ask me? Vaginoplasty, I keep it nasty. » Dans une adresse frontale à la caméra et en une scansion frondeuse, Peaches déclame les paroles de l’un de ses titres, « Vaginoplasty », hymne à son sexe dont elle explore les possibilités. La géniale Marie Losier (Cassandro the exótico!) filme la chanteuse, figure de l’electroclash et féministe, au gré de rencontres sur dix-sept ans. Une archive incandescente de l’amitié entre deux artistes insoumises.

La Petite Dernière
Nadia Melliti et Ji-Min Park dans « La Petite Dernière » © June films Katuh studio Arte France mk2films

La Petite dernière de Hafsia Herzi

Fatima (la révélation Nadia Melliti) ne ressemble pas à ses sœurs et ne répond pas aux attentes familiales : elle aime le foot, la philo, pas les garçons. Adaptant le roman autofictionnel de Fatima Daas, Hafsia Herzi (qui est repartie du dernier Festival de Cannes avec la Queer Palm et un prix d’interprétation pour son actrice principale) préserve à la fois la finesse intimiste de ses films précédents (Tu mérites un amour, Bonne mère) et le caractère vibrant de ses personnages, dans un mélange de piquant et de générosité. 

Put Your Soul on Your Hand and Walk
© New Story

Put Your Soul on Your Hand and Walk de Sepideh Farsi

Pendant des mois, Sepideh Farsi a filmé ses conversations avec Fatima Hassouna, photographe palestinienne coincée à Gaza. Peu avant la projection de ce documentaire bouleversant à Cannes, sa protagoniste périssait sous les bombes. Durant une heure cinquante, l’image de cette jeune femme est, on le sait, vouée à s’effacer. Le film atteint une puissance terrifiante lorsqu’il ne montre plus qu’un écran noir sur les enregistrements du sifflement des bombes. 

Queer
© Pan Distribution

Queer de Luca Guadagnino

En adaptant le roman suintant de William S. Burroughs, l’Italien Luca Guadagnino réalise une œuvre résolument queer, dans le sens le plus littéral du terme, c’est-à-dire étrange. Un étrange conte d’amour miséreux aux décors surréalistes, emmené par l’inattendu Daniel Craig dans la peau d’un écrivain drogué, établi à Mexico, qui tombe follement amoureux d’un élégant jeune homme (Drew Starkey). Le tout bercé par une bande-son hypnotisante qui vous fait planer autant que l’ayahuasca.

le rendez vous de l ete
© New Story

Le Rendez-vous de l’été de Valentine Cadic

Ne vous fiez pas à la simplicité de son synopsis (sur une jeune femme qui erre dans Paris pendant les J.O. de 2024). Avec ce premier long métrage, Valentine Cadic, 29 ans, vue comme actrice chez Léa Mysius ou Guillaume Senez, signe un film estival à la fois flottant et mélancolique. Un séduisant coup d’essai dans la lignée de ses courts métrages (Les Grandes Vacances, La nuit n’en finit plus, La Saisonnière), à cheval entre docus et fictions.  

"Le Rire et le couteau" (c) Météore Films
© Météore Films

Le Rire et le couteau de Pedro Pinho

C’est l’un des films qui nous a le plus cueillis à Cannes, où il était projeté en à Un certain regard. Ingénieur environnemental portugais envoyé en mission en Guinée-Bissau, Sérgio déambule dans des paysages imposants où il évalue un projet de construction d’une route entre le désert et la forêt. Curieux, il va se lier à plusieurs personnes nées et vivant sur place, qui n’hésiteront pas à dire à Sérgio combien il incarne à leurs yeux un agent du capitalisme occidental. Tout l’intérêt provient justement du fait que Sérgio semble accepter la critique. Un souffle inattendu qui dépasse le brûlant contexte postcolonial pour créer un espace de désirs fluctuants.

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© Singularis Films

Sauve qui peut d’Alexe Poukine

Deuxième film signé de la Française Alexe Poukine sorti cette année (avec Kika, voir plus haut), le documentaire Sauve qui peut sonde le milieu hospitalier à travers des ateliers de simulation théâtrale au sein desquels le personnel soignant s’entraîne à perfectionner son empathie face à des patients incarnés par des comédiens. Un jeu qui devient soudainement vertigineux lorsque les soignants se confient sur les souffrances liées à leurs conditions de travail. Par un brillant montage et une élégante énergie du désespoir, cette œuvre foncièrement politique atteint une vraie puissance dramatique.

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© JHR Films

Sept promenades avec Mark Brown de Pierre Creton

La contemplation, la rêverie, ce sont les vertus explorées par le dernier film du couple Pierre Creton-Vincent Barré, toujours situé dans le pays de Caux, terre des films qu’ils créent ensemble, qu’ils soient tour à tour cinéastes ou acteurs. Après le dément Un prince (2023), les deux artistes suivent leur ami paléobotaniste Mark Brown dans son projet de reconstituer une forêt primaire dans son jardin, en Normandie. En résulte un documentaire flâneur et sensuel.

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© Pyramide Distribution

Sirāt d’Oliver Laxe

Road-movie mystique et dangereux, le film d’Oliver Laxe, récompensé du prix du jury à Cannes, suit le chemin de Luis (Sergi López), dont la fille Mar est portée disparue depuis cinq mois. Perdu quelque part au Maroc, il se greffe à une bande de ravers pour un voyage aux portes du monde, secoué par une bande-son vibrante, hypnotique et terriblement contagieuse. Un film qui hante longtemps après son visionnage.

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© Les Valseurs

Soundtrack to a coup d’état de Johan Grimonprez
Au gré d’un montage kaléidoscopique d’archives raccordées au rythme de morceaux de jazz, Johan Grimonprez retrace l’histoire de l’indépendance du Congo et des conspirations occidentales pour maintenir son emprise impérialiste. Textes d’historiens, articles scientifiques, documentaires d’époque, photographies, publicités et entretiens filmés s’entrecroisent ainsi pour produire les téle­scopages godardiens à même de revenir sur ce moment décisif de la guerre froide, où conversent à distance Nina Simone, Nikita Khrouchtchev, Andrée Blouin, Fidel Castro et Malcolm X.

Valeur sentimentale
© Memento Distribution

Valeur sentimentale de Joachim Trier

On a tellement aimé le dernier film du cinéaste norvégien qu’on l’a mis en couv de notre numéro d’été. Avec la délicatesse qu’on lui connaît, Joachim Trier (Oslo, 31 août ; Julie (en 12 chapitres)) signe une chronique familiale d’une profondeur émotionnelle et narrative éblouissante, qui lui a valu le Grand Prix au dernier Festival de Cannes. Dans le film, un cinéaste septuagénaire (Stellan Skarsgård) tente maladroitement de renouer, à travers un film qu’il s’apprête à tourner et pour lequel il engage une jeune actrice américaine (Elle Fanning), avec ses filles adultes.

Jodie Foster / Vie Privée / Rebecca Zlotwoski
© Ad Vitam

Vie privée de Rebecca Zlotowski

Pour son premier rôle principal en français, la légende américaine Jodie Foster campe une psy perturbée par la mort soudaine d’une de ses patientes (Virginie Efira), qui se met à soupçonner la fille (Luàna Bajrami) puis le mari (Mathieu Amalric) de celle-ci. Résultat : un jeu de pistes drôle, profond et élégant mené par nulle autre que notre queen Rebecca Zlotowski (Une fille facile, Les Enfants des autres).