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CANNES 2024 · « Locust » de KEFF : la solitude du gang

  • Léa André-Sarreau
  • 2024-05-16

[CRITIQUE] Dans ce film néo-noir aux accents tragiques présenté à la Semaine de la critique, le cinéaste Keff observe une jeunesse taïwanaise prise en étau entre la violence et l’amour. Une première œuvre ample et désespérée, à l’image de son héros.

Quand on le voit pour la première fois à l’écran, Zhong-Han (Liu Wei Chen), la vingtaine, a quelque chose du Samouraï campé par Alain Delon dans le film de Jean-Pierre Melville. Muet, impassible, on découvre rapidement qu’il mène une double vie : serveur dans le restaurant familial le jour, petite frappe la nuit. Avec une bande de voyous, il dépouille la jeunesse dorée de Taïwan pour noyer son ennui, jusqu’au jour où il doit se retourner contre son propre gang…

Locust marche d’abord fièrement dans les pas du cinéma américain, avec des rixes urbaines qui évoquent La Fureur de vivre, d’incontrôlables saillies de violence graphiques sur lesquelles planent l’ombre d’Orange mécanique. Avant de se délester peu à peu de ses références pesantes par une énergie singulière. C’est que la caméra mobile de Keff saisit ses héros dans une torpeur permanente, presque neurasthénique. Au fin fond des boîtes de nuit poisseuses criblées de néons, dans les artères moites de la ville illuminée, le film parvient à toucher un indicible spleen, une je ne sais quoi existentiel qui ne se nomme pas mais s’éprouve dans un exercice formel virtuose.

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Quelque chose de l’ennui, du vague à l’âme vient alors s’incarner dans des travellings fluides, des ralentis irréels, de longs plans tristes sur les visages absents. Tout se passe comme si le mutisme du héros, symbole d’une jeunesse hermétique au monde, avait rongé la mise en scène de l’intérieur. À mesure que Zhong-Han renonce à l’amour, seule forme de rédemption possible incarnée par une jeune fille (Rimong Ihwar), le film mute comme lui pour s’approcher d’un laconisme, d’une épure esthétique. Locust apparaît alors tel qu’il est – comme un mouvement impitoyable vers la violence, et la solitude de ceux qui l'ont choisie.

Le Festival de Cannes se tiendra cette année du 14 au 25 mai 2023. Tous nos articles sur l’événement sont à suivre ici.

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