« La Condition » de Jérôme Bonnell : sororité nouvelle

Quatre ans après son fabuleux huis clos « Chère Léa », le sentimental Jérôme Bonnell se tourne vers le film d’époque pour raconter un arrangement complice entre une bonne et sa maîtresse, au début du XXe siècle.


La Condition
© Line Nieszawer

Pour dépeindre les mécanismes du cœur, Jérôme Bonnell n’a pas son pareil. Le réalisateur français a sans doute été séduit par la complexité des sentiments décrits dans le roman de Léonor de Récondo, Amours. Bien qu’elle n’en conserve pas le titre, lui préférant La Condition, l’adaptation de ce livre examine pareillement les ressorts surprenants de l’attachement.

L’histoire se passe en 1908, en Normandie, dans la demeure bourgeoise du notaire André et de son épouse Victoire. Le mariage est malheureux, surveillé par la belle-mère, muette et alitée, qui questionne sans cesse le couple sur l’arrivée d’un enfant. Un soir, le médiocre mari, interprété avec dureté par Swann Arlaud, abuse de Céleste, la jeune bonne taiseuse à leur service. Un garçon naît de ce viol ; Victoire propose de l’adopter et achète le silence de la servante, autorisée à travailler encore pour eux.

Après Chère Léa (2021), racontant l’histoire d’un homme écrivant une lettre à son ex-petite-amie pour la reconquérir, le cinéaste construit ici son récit du point de vue féminin, mettant l’accent sur la sororité entre deux femmes que tout oppose. Si leur alliance évoque l’ingénieux Mademoiselle de Park Chan-wook, l’absence de voyeurisme dans la mise en scène et l’interprétation de Louise Chevillotte et de Galatéa Bellugi confèrent une rare délicatesse à ce film.

La Condition de Jérôme Bonnell, Diaphana (1 h 43), sortie le 10 décembre