Du 10 au 17 décembre, on part à bicyclette dans un court-métrage de François Truffaut, on danse au rythme de Sonic Youth dans un docu musical signé Olivier Assayas, tandis que Wim Wenders nous entraîne dans un polar âpre et labyrinthique. Une sélection à savourer comme toujours gratuitement.
François Truffaut a 25 ans lorsqu’il tourne Les Mistons en 1957. Connu des lecteurs des Cahiers du cinéma, le « Jeune Turc » de la critique troque enfin la plume pour la caméra, monte à l’occasion sa société de production, Les Films du carrosse, et signe un court-métrage spontané, au réalisme criant. La toute jeune Bernadette Lafont (c’est son premier rôle) et Gérard Blain (son mari de l’époque) y interprètent un couple chahuté par une bande de gamins dans les rues de Nîmes. Ce qui n’était qu’une blague immature, motivée par une jalousie inconsciente, tourne au drame…Il y a là tout ce qui fera le sel du cinéma de Truffaut : la cruauté de l’enfance, la mort qui frappe brutalement sans prévenir, la nature sensuelle, sa filiation avec le cinéma de Jean Renoir, et le naturalisme poétique emprunté à Jean Vigo.
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OLIVIER ASSAYAS ET WIM WENDERS À L’HONNEUR
En 2005, Olivier Assayas se voit confier la programmation du festival Art Rock de Saint-Brieuc. Le cinéaste mélomane à la patte punk convie alors les artistes qu’il adore : le quatuor de Sonic Youth, Jeanne Balibar, Kim Gordon, Marie Modiano ou encore Afel Bocoum…et en tire Noise (2006), un documentaire musical électrique et décapant. Le plaisir qu’il prend à les filmer (il a été épaulé dans les prises de vues par les réalisateurs Michael Almereyda, Olivier Torrès, Léo Hinstin et Laurent Perrin et le directeur de la photo Eric Gautier) est tellement évident que le film prend en creux la forme d’un autoportrait à l’atmosphère tour-à-tour intimiste et psychédélique.
Ne vous y trompez pas. Le titre du polar de Wim Wenders qu’on vous propose de découvrir cette semaine n’annonce pas sa couleur – The End of Violence (1997) est une variation complexe et désenchantée sur la brutalité des hommes, la déshumanisation irréversible par les images. Bill Pullman y interprète un producteur hollywoodien cynique, qui doit sa carrière à l’exploitation de la violence. Un jour, il se trouve lui-même confronté à deux tueurs chargés de l’éliminer. Ils parviennent à le kidnapper mais, le lendemain, ce sont leurs corps décapités que l’on retrouve… Commence alors une enquête labyrinthique, patchwork cauchemardesque qui navigue entre thriller et comédie de moeurs. Wim Wenders morcèle son récit, et déploie des digressions pour noyer son spectateur dans une réflexion sur la perdition morale d’Hollywood.
LES KENNEDY, UNE HISTOIRE DE FAMILLE
Suite de notre saga politique avec Les Kennedy : Crisis – Behind a Presidential Commitment de Robert Drew (1963), troisième épisode dédié à la campagne de John F. Kennedy et son arrivée dans le bureau oval. Avec une acuité toujours aussi haletante, Crisis revient sur le combat du président pour l’intégration de deux étudiants noirs dans l’Université d’Alabama.
UN COURT-MÉTRAGE INÉDIT DE MARIN KARMITZ ET MARGUERITE DURAS
Enfin, on vous donne rendez-vous dans la moiteur de l’Inde avec Nuit noire, Calcutta de Marin Karmitz (1964) (producteur, réalisateur et fondateur de la société mk2, qui édite ce magazine), court-métrage écrit par Marguerite Duras sur un écrivain alcoolique confronté à l’impuissance de la création et au syndrome de la page blanche. À l’origine, le projet était une commande d’un laboratoire pharmaceutique pour un médicament contre l’alcoolisme, que Marin Karmitz a décidé de transformer en fiction en faisant appel à Duras, tout juste sortie d’une cure de désintoxication.
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Le programme du 10 au 16 décembre
The End of Violence de Wim Wenders (1997, 122 minutes)
Les Mistons de François Truffaut (1957, 23 minutes)
Noise d’Olivier Assayas (2006, 120 minutes, documentaire)
Les Kennedy : Crisis – Behind a Presidential Commitment de Robert Drew (1963, 52 minutes, documentaire)
Nuit noire, Calcutta de Marin Karmitz (1964, 26 minutes)