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« Feu Follet » de João Pedro Rodrigues : une fantaisie hédoniste chez les pompiers

  • David Ezan
  • 2022-05-27

Le très queer João Pedro Rodrigues réveille les passions avec une comédie musicale avant-gardiste sur l’initiation sexuelle d’un jeune prince portugais devenu pompier.

Si l’on connaissait João Pedro Rodrigues pour ses ovnis flamboyants et radicaux, de O Fantasma (2000) à Mourir comme un homme (2009), on l’attendait moins sur le terrain de la franche comédie. C’est chose faite avec Feu follet, un film camp tout juste présenté à la Quinzaine des réalisateurs et où le cinéaste parodie la destinée du jeune prince Alfredo depuis sa mort en 2069. En une suite de vignettes hilarantes, Rodrigues théâtralise les mœurs d’une aristocratie portugaise engoncée dans le souvenir de son impérialisme ; le fond est grave, mais le ton burlesque et hédoniste du cinéaste emporte tout sur son passage.

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Savoureux pot-pourri, le film se nourrit d’un certain malaise sociétal (s’y confondent l’écologie de Greta Thunberg, la crise sanitaire ou encore la recrudescence du racisme) pour l’exorciser via la fiction. On pourrait aussi dire « pour l’érotiser » tant Feu follet est pétri d’une imagination fertile, à tel point que les arbres d’une forêt menacée sont assimilés à l’organe viril par le père d’Alfredo. Ce dernier, soudain épris d’un désir irrépressible pour cette nature sauvage, se décide alors à devenir pompier ; c’est le début d’une initiation charnelle pour le prince, et celui d’une débandade érotique pour João Pedro Rodrigues. Travaillé par la question du détournement, le cinéaste ne déroge pas à la règle : les soldats du feu sont soumis à des entraînements filmés comme des rituels torrides, et les corps saillants y sont disposés selon des tableaux de maîtres.

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Difficile de résister au charme espiègle du récit, qui se joue des symboles sans pour autant les reconduire ; chez Rodrigues, la caserne est un lieu d’émancipation purement organique. Les corps s’y heurtent, dansent et s’embrassent au gré d’une séance de bouche-à-bouche, scellant un amour entre le prince blanc et son collègue noir ; de quoi éteindre bien des incendies. La comédie se mue en tragédie sentimentale, et l’émotion afflue comme par surprise. C’est que Rodrigues fait feu de tout bois, et démontre avec brio qu’il n’est pas nécessaire de succomber à la standardisation pour signer des films furieusement politiques.

Feu follet de João Pedro Rodrigues, JHR Films (1 h 07), sortie le 14 septembre

Images (c) JHR FILMS

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