
Une femme d’un certain âge s’affaire, s’apprête, prépare à manger. Un homme, plus jeune, se présente chez elle, s’installe. Le repas se passe paisiblement dans une ambiance feutrée. Alors que la femme semble jauger son invité comme un potentiel amant, un glissement subtil, léger, vient nous renseigner sur la nature de leur lien. Ce sont une mère et un fils, et bientôt la dame quittera sa maison pour rejoindre une maison de retraite…
L’ouverture d’À feu doux dit bien tout l’enjeu théorique et formel d’un film à infusion lente prenant pour sujet la maladie d’Alzheimer moins pour discourir sur la pathologie que pour en saisir, sensoriellement, le lent processus d’effritement. Le film sait très bien regarder ce moment où quelque chose dans le regard de Ruth se dérobe, se dérègle, où la clarté de sa parole est tout à coup brouillée par une pensée confuse.
Dans À feu doux, les soignants et soignantes occupent une place centrale. Ce sont pour la plupart des femmes racisées. Le film les regarde dans la réalité de leur condition précaire, et le fait que les résidents de l’établissement soient de vrais patients renforce son exigence et son ambition documentaire. Mais la plus grande vertu d’À feu doux est cette délicatesse enveloppante qui prime sur tout, se substitue aux gestes médicaux du soin, pour accompagner et étreindre la mue progressive de son héroïne dont l’esprit vacille, mais dont le corps ressent.
À Feu Doux de Sarah Friedland, sortie le 13 août, Arizona (1 h 30)