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« Les Dents de la mer » sur TMC : l’histoire vraie derrière le blockbuster de Steven Spielberg

  • Trois Couleurs
  • 2020-11-24

Ce soir sur TCM à 20h50, le premier blockbuster du cinéma va vous baigner en eaux troubles. Près d’un demi-siècle après la sortie du film, retour sur une série de drames qui en seraient à l’origine.

Été 1975. Dans la chaleur saisonnière, Steven Spielberg, jeune cinéaste prometteur âgé de 20 ans, s’apprête à revigorer l’industrie hollywoodienne avec la sortie de son deuxième long-métrage, intitulé Les Dents de la mer et tourné un an plus tôt dans des conditions difficiles. Considéré quelque temps plus tard comme le tout premier blockbuster de l’histoire du cinéma, ce film met en scène avec virtuosité l’été sanglant d’une petite station balnéaire américaine, Amity, dont le quotidien paisible se retrouve entaché par la découverte d’un corps de femme atrocement mutilé sur une plage. Le chef de la police (Roy Scheider) explore d’emblée la piste du squale mangeur d’hommes et décide d’interdire l’accès aux plages mais le maire, obnubilé par ses touristes, s’oppose drastiquement à sa décision. Pendant qu’ils peinent à trouver une issue, le requin continue de faire des ravages…

Avec son thème musical minimaliste mais puissant orchestré par le compositeur John Williams, son art de la suggestion et sa capacité à recréer une atmosphère de terreur collective, ce film – critique en creux de la société de consommation – remportera en salles un succès immédiat, amplifié – vous noterez le paradoxe – par une campagne marketing ultra poussée (entre spots télés, gadgets et goodies multiples). À l’origine de cet engouement populaire et planétaire, un roman, présentant lui-même beaucoup de points communs avec des faits divers du début du XXe siècle.

UN BEST-SELLER LÉGÈREMENT PLUS DRÔLE ET DESCRIPTIF

En 1974, Spielberg a lu le best-seller éponyme de l’auteur américain Peter Benchley, qui a écrit plusieurs discours pour le président américain Lyndon B. Johnson et  qui, passionné par l’univers maritime, a décidé d’y revenir à travers ce roman. Le film que Spielberg en tirera restera dans l’ensemble assez fidèle au livre de Benchley, même s’il se différencie dans ton (en étant un poil plus sérieux), qu’il décrit moins précisément les personnages et qu’il en modifie certaines scènes d’action, notamment son final — attention spoiler : la mort du requin est provoquée dans le bouquin par les multiples blessures qui lui sont infligées. Dans le film, en revanche, le requin périt après l’explosion d’une bouteille d’oxygène. Pour l’anecdote, Benchley avait trouvé cette fin alternative peu convaincante. — fin du spoiler

Ce qu’on sait moins, et que le site américain Smith Sonian Magazine a suggéré en 2012 avec force détails (même si Benchley a nié tout lien dans le New-York Times en 2001), c’est que le roman serait lui-même inspiré d’un fait divers hallucinant impliquant des jeunes gens du New-Jersey près de 60 ans auparavant.

UNE SUCCESSION DE SOMBRES AFFAIRES DANS LE NEW-JERSEY EN 1916

Coupure de presse de l’époque / In 1916, a great white shark attacked five people near the Jersey Shore. © (Library of Congress)

Nous sommes le 1er juillet 1916. Fils d’un businessman réputé de Philadelphie, Charles Vansant, 25 ans, se rend sur la plage de Beach Haven. Victime d’un requin, le jeune homme est repéré par plusieurs hommes qui tentent de le sauver, en vain. Seulement cinq jours plus tard, Charles Bruder, 27 ans au compteur et groom dans un hôtel, décède après s’être baigné près de Spring Lake. Un capitaine de bateau affirme alors avoir vu un requin, mais son témoignage n’est pas soutenu par les locaux. À l’époque, ils étaient peu à croire à la dangerosité des squales. Sont alors évoquées d’autres hypothèses, parfois étranges – certains sont allés jusqu’à rejeter la faute sur les tortues de mer, comme l’a expliqué George Burgess, ichtyologiste et biologiste des pêches au Florida Museum of Natural History de l’Université de Floride, au Smith Sonian Magazine.

Mais quand, six jours seulement après la mort de Bruder, d’autres drames viennent frapper de plein fouet les habitants du New-Jersey, le vent tourne. Le 12 juillet, aux environs de Matawan Creek, le petit Lester Stillwell, 11 ans, est lui aussi attaqué. Watson Stanley Fisher, alors témoin de la scène, essaie de le sauver, sans succès. Il succombera quelques heures plus tard à ses blessures. Une demi-heure plus tard, un adolescent, Joseph Dunn, se fait lui aussi poursuivre, mais parvient à s’échapper. Ces tragédies poussent à la vindicte populaire : des habitants du New-Jersey font sauter le soir même la crique avec de la dynamite (le lien avec le roman de Benchley semble alors évident). Ils auront finalement la peau du requin blanc, qu’ils parviennent à capturer et dont ils découvrent que l’estomac est rempli de restes humains.

Ces histoires, tout comme la violence du film de Spielberg, ont profondément marqué notre perception collective des requins. Au grand regret de Peter Benchley qui, d’après cet article du Boston, a confié avoir regretté la parution de ce roman, l’espèce étant grandement menacée.

Par Cameron Guyot 

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