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I.A. QUOI ? · Les vertus des contraintes

  • Julien Dupuy
  • 2024-05-06

Fort de son expérience sur « L’Hôtel du Temps », la société française MacGuff continue d’intégrer les I.A. dans la conception des effets spéciaux numériques avec sa technologie « Face Engine ».

L’un de ses derniers travaux en date est la série Tout va bien, dans laquelle une fillette est traitée contre une leucémie. Une partie des traitements ont des effets secondaires sur la jeune malade et vont, notamment, faire gonfler considérablement ses joues. Ce type de transformation physique est, depuis la création des masques souples sur mesure du Magicien d’Oz en 1939, relativement facile d’accès : elles sont conçues à l’aide de maquillages prosthétiques en matières plastiques diverses (mousse de latex, silicone, etc.)

Seulement, un acteur enfant ne peut, en France, travailler que quatre heures par jour. Et le studio Atelier 69, qui a conçu les transformations de la petite malade de Tout va bien, avait besoin quotidiennement de quatre heures pour appliquer, maquiller et enfin retirer en fin de journée les prothèses sur la jeune actrice.

“Tout va bien” : au bord de la crise de nerfs

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Les I.A. de MacGuff sont parvenues à résoudre l’épineuse situation : la comédienne a été maquillée une seule fois en préproduction, puis son visage a été scanné. Lors des prises de vues, elle a pu interpréter toutes ses scènes sans subir le maquillage prosthétique. Et en postproduction, MacGuff a pu lui appliquer un maquillage virtuel, calé et fondu sur son visage grâce, notamment, aux I.A. Cette technologie, encore améliorée récemment pour la série Lupin, est un gain de temps et de confort considérable pour les comédiens. Mais ce progrès est-il forcément une bonne chose ? Un élément aussi contraignant qu’un maquillage prosthétique est fréquemment devenu un atout pour les comédiens qui le portent.

C’est ce que raconte John Caglione, maquilleur chargé de transformer Al Pacino en Big Boy Caprice pour Dick Tracy (1990) de Warren Beatty. Chaque matin, Pacino s’endormait sur le siège du maquilleur et, lorsqu’il se réveillait sous le masque grotesque de Caprice, il avait abandonné sa véritable personnalité pour se comporter comme le personnage jusqu’au démaquillage.

Bien avant Pacino, l’une des plus grandes stars du cinéma muet, Lon Chaney, avait fait de ces maquillages, qu’il s’appliquait lui-même, la pierre de voûte de ses incroyables performances. Sa souffrance (il écartait ses paupières à l’aide de fils de fer par exemple) était primordiale dans la réussite de ses interprétations, du Quasimodo de Notre Dame de Paris (1923) à Erik dans Le Fantôme de l’Opéra (1925).

Il en va des maquillages prosthétiques comme du reste : les contraintes ont toutes des vertus qu’il serait regrettable d’abandonner. C’est d’ailleurs ce que célèbrent des réalisateurs amateurs de technologies archaïques, comme Wes Anderson ou Christopher Nolan. Et même si l’I.A. va permettre à toutes les équipes de cinéma d’alléger leur charge de travail, il est primordial de garder en tête que ces immenses progrès techniques offrent surtout un nouveau choix aux cinéastes. Autrement dit, et comme nous l’a déjà prouvé l’Histoire du cinéma à maintes reprises, aucune avancée technologique n’efface la précédente : elles s’accumulent pour, à chaque fois, élargir le champ des possibles du septième art.

EN + Une table ronde avec, notamment, le directeur de la photographie de Tout va bien et Alexandre Astier.

EN + Un formidable documentaire, présenté dans son intégralité sur le Blu-ray édité par Carlotta, montrant l’application, par Dick Smith, du maquillage de vieil Indien sur Dustin Hoffman dans Little Big Man. Il est fascinant de voir comment ce processus laborieux permet au comédien d’affiner la posture du personnage.

EN + Un internaute a modifié, notamment avec l’I.A., les personnages du film d’horreur Smile.

I.A. PLAYLIST

La très impressionnante démonstration de l’outil proposé par Infinite Realities permet de capter des comédiens en 3D, pour choisir l’axe et le mouvement de caméra en post production.

L’historien Yuval Noah Harari, auteur de Sapiens – une brève histoire de l’humanité, partage son opinion, plutôt très négative, sur les I.A. chez Stephen Colbert.

Plus de 200 musiciens, parmi lesquels Robert Smith, Billie Eilish ou les gérants de l’œuvre de Frank Sinatra, viennent de signer une lettre ouverte contre l’émergence de l’I.A. générative. 

Spécialiste du cinéma bis et ex grande plume du magazine Starfix, Christophe Lemaire s’est emparé des I.A. et propose des visuels totalement absurdes autour du cinéma. Ne loupez pas sa version d’Anatomie d’une chute de Justine Triet ou du Napoléon de Ridley Scott.

Image : Le Magicien d'Oz

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