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  • 3 min

« Le Genou d’Ahed » de Nadav Lapid : tempête de sable

  • Renan Cros
  • 2021-07-10

Cinéaste radical, Nadav Lapid ose un film état-d’âme politique et impudique, Prix du Jury au Festival de Cannes 2021. Du cinéma coup de boule, virtuose et très en colère.

Avec Synonyme (Ours d’Or à Berlin en 2019), Nadav Lapid a imposé dans le paysage d’auteur son cinéma tranchant, toujours plus expérimental. Comme libéré de devoir faire les présentations, il se permet avec Le Genou d’Ahed d’aller à l’os de son cinéma et de ne surtout pas nous ménager. C’est la force – et la limite aussi peut-être- de ce film qui claque comme un coup de fouet, rumine avec aigreur et finit par s’emporter dans une colère noire. Du cinéma épuisé, endeuillé et furieux qui utilise la fiction comme une catharsis.

Nadav Lapid nous parle littérature

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Y, cinéaste israélien reconnu, vient présenter dans un coin reculé du pays son nouveau film. De ce sujet mince, Lapid va tirer un film très sophistiqué, à la mise en scène torturée, lardées de chocs esthétiques. Mouvements de caméra très marqués (Lapid secoue la caméra, l’envoie en l’air, la pivote comme une girouette), incursion du clip vidéo, moment étrange et onirique sur du Vanessa Paradis, digressions dans le film de guerre, tout vient parasiter le récit et provoque une véritable cacophonie filmique.

 On est ici au croisement de la fiction et du sentiment pur, comme si l’aigreur et l’apathie de ce cinéaste éreinté faisaient corps avec le film. Perplexe d’abord, puis étrangement porté par l’énergie méchante du personnage et du film, on se laisse emporter dans ce maëlstrom furieux, abscons et pourtant plein de cinéma. Jusqu’à un point de non-retour.

Dans un geste final d’auto-fiction (voire d’autoflagellation) sidérant, le cinéaste lance son personnage, confronté à la censure d’Etat, dans une diatribe violente et radicale contre son pays, un moment de détestation et de haine, entre la douleur et la grandiloquence. Un moment sidérant, une sorte d’hara-kiri cinématographique, qui laisse personnages et spectateurs exsangues. Du cinéma sans compromis, comme un cri de colère, une baffe qui réveille.

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