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« Border Line » : un huis clos intense qui vole haut

  • Justine Carbon
  • 2024-04-26

[Critique] Premier long métrage du duo vénézuélien formé par Juan Sebastián Vásquez et Alejandro Rojas, « Border Line » est un huis clos chronométré, sur fond de critique sur la politique trumpiste. Un thriller haletant porté par Alberto Ammann et Bruna Cusí, brillants de réalisme.

Gagnant de deux prix lors du 36e Festival Premiers Plans, Border Line est inspiré des vécus de ses réalisateurs, ancien réalisateur et monteur pour l'un et directeur photo pour l'autre, tous les deux vénézuéliens. Comme le personnage de Diego (Alberto Ammann), ils ont vécu cette injustice sociale et xénophobe aux points de contrôle des aéroports étasuniens.

Le film suit donc un couple de trentenaires, Diego et Elena, qui décident de quitter Barcelone pour tenter le rêve américain. Mais à leur arrivée aux Etats-Unis, le contrôle des passeports s’éternise, faisant sombrer les personnages dans les couloirs isolés de l'aéroport. Leur sort finit entre les mains d’agents de la Police des Frontières, bien décidés à déballer la vie du couple...

À la frontière du moyen métrage, Border Line et ses 1h17 ne perdent pas de temps. Geste déjà significatif : le vol amenant les personnages aux Etats-Unis est éclipsé. Grâce à une ellipse astucieuse, les réalisateurs cantonnent, jusqu’au contrôle à la douane, l’identité du couple, pour l’instant restreint à une identité floue de voyageur. 

Juan Sebastián Vásquez et Alejandro Rojas placent leur récit pendant l’ère Trump, où les questions d’immigration aux Etats-Unis étaient particulièrement débattues. Familiers de ces questions, les réalisateurs retranscrivent leur vécu au travers du personnage de Diego, également vénézuélien. Ils apportent toutefois une nuance en choisissant une nationalité européenne pour Elena, quant à elle espagnole. De surcroît, une inégalité s’installe au sein du couple.

Border Line © Condor Distribution

À cette mise en lumière de la condition fragile des immigrés se superpose donc un questionnement passionnant sur l'inégalité dans le couple. Ici, la nationalité d’Elena est un privilège. Son passeport européen lui permet de remettre en cause les conditions de sa détention, là où Diego fait profil bas.  Admettant très vite un dispositif de champ contrechamp, le film unit dans un premier temps le couple dans le cadre, puis le divise par le biais d’une amorce grandissante.

Avec Border Line, Juan Sebastián Vásquez et Alejandro Rojas dépassent le secret de l'intime et offrent un premier essai politique sur les abîmes des inégalités sociales et raciales.

Border Line de Juan Sebastián Vásquez et Alejandro Rojas, Condor Distribution (1H17), sortie le 1er mai 2024

Image : © Charades

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