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« Chronique d’une liaison passagère » d’Emmanuel Mouret : partition adultère

  • David Ezan
  • 2022-05-21

Après « Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait » (2020), Emmanuel Mouret poursuit sa fine entomologie du couple via une relation adultère épisodique, laquelle fait naître une alchimie improbable du duo formé par Vincent Macaigne et Sandrine Kiberlain.

Cinéaste du verbe par excellence, Emmanuel Mouret (Caprice, Mademoiselle de Joncquières) s’est taillé une place à part dans un cinéma d’auteur français en manque de filouteries amoureuses. Cela tombe bien : l’écriture de Mouret, alliage excitant de désinvolture et de sophistication, détricote à merveille ce jeu étrange auquel on se livre lorsqu’on cherche à séduire.

C’est tout le propos de Chronique d’une liaison passagère qui, comme une contradiction à l’imbroglio choral de Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait, circonscrit son récit aux seules entrevues d’un couple adultère. On ne saura que peu de choses de leur vie outre mesure, si ce n’est qu’elle (Sandrine Kiberlain) est une mère célibataire et qu’il (Vincent Macaigne) est un homme marié. À quoi bon filmer le reste ? L’étonnante sobriété du récit, chapitré au rythme des rendez-vous, est un vrai coup de génie : débarrassé d’encombrantes sous-intrigues, le cinéaste peut alors se consacrer à ses personnages et à eux seuls.

Il accomplit aussi ce qu’on imagine être son fantasme : sculpter un dialogue amoureux comme ininterrompu, de l’étape de la séduction jusqu’aux premiers signes d’usure. Le film en devient presque musical ; le couple danse une valse ténue avec ses sentiments, priés de ne pas faire déborder le vase, quand les répliques s’échangent et affluent à la manière d’un free jazz. Chacun sa partition, et son équilibre échappera précisément au duo via l’irruption d’un troisième musicien…

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C’est dire que les mots sont l’instrument d’Emmanuel Mouret, qui enchaîne les saillies et affronte la langue sans jamais craindre l’irréalisme. Au contraire, c’est cette intensité qui confère au film sa dimension spectaculaire – de rire, de gêne, d’émotion. Terrain de jeu idéal pour ses comédiens, qui ont rarement été aussi justes ; si on connaissait Vincent Macaigne en romantique un peu gauche, il est ici d’une drôlerie inégalée. Sandrine Kiberlain, elle, surprend en femme entreprenante et désinhibée. Avec la malice qu’on lui connaît, nul doute que le cinéaste s’est plu à marier ce duo improbable en inversant royalement les stéréotypes.

Chronique d'une liaison passagère d'Emmanuel Mouret, 1h40, Pyramide, sortie le 12 septembre

Image © Pyramide Distribution

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