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  • Cannes 2021
  • Critique
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  • 3 min

« Un Héros » d'Asghar Farhadi : parcours du combattant

  • Damien Leblanc
  • 2021-07-15

De retour en Iran après l’escapade espagnole d’"Everybody Knows", Asghar Farhadi impressionne avec ce drame moral où un prisonnier endetté se débat avec l’hostilité d'une société peu encline à faire des cadeaux.

Ce film a remporté le Grand prix au Festival de Cannes 2021

En prison depuis trois ans à cause d’une dette qu’il n’a pas pu rembourser, Brahim (Amir Jadidi) bénéficie d’une permission de sortie de deux jours durant laquelle il va tenter de persuader son créancier de retirer sa plainte. Un sac à main rempli de pièces d’or se dresse alors sur le chemin de Brahim et lui donne l’espoir d’une rédemption.

En proposant une immersion totale avec un personnage dont on découvre vite les différentes fonctions sociales (il est divorcé, père d’un enfant bègue et fréquente une femme qu’il voudrait épouser), Asghar Farhadi renoue avec les fables pleines d’ambivalence morale qui ont fait son succès (Une Séparation et son Ours d’or à Berlin, Le Client et son Prix du scénario à Cannes).

S’il jouit d’un entourage bienveillant et d’un coup du sort qui va lui permettre de devenir un héros médiatique, Brahim voit son destin remis en doute par la réflexion toujours aussi pessimiste d’un cinéaste qui construit ici un minutieux engrenage où s’entrechoquent les tensions de la société iranienne, la gredinerie des agents de l’administration, la violence des réseaux sociaux et la manipulation du concept de vérité.

Mise en scène acérée, écriture étouffante de suspense et brillante direction d’acteurs font ainsi d’Un Héros (titre ironique au possible) un excellent cru où l’anti-héros Brahim affiche constamment un sourire équivoque, qui a autant le don d’irriter ses détracteurs que de séduire ses défenseurs. Au milieu de ce parcours du combattant empruntant aussi bien au thriller hitchcockien qu’au mélodrame social italien, Farhadi parvient à ménager un espace de respiration et à offrir un contrepoint humaniste à travers le personnage du fils de Brahim.

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Assistant régulièrement aux déboires de son père et se retrouvant souvent dans le cadre malgré lui, cet enfant devient progressivement la victime du monde des adultes et finit par prendre une épaisseur déchirante. C’est avec ces séquences poignantes qui donnent à voir un fils faisant tout son possible pour s’exprimer malgré ses défauts d’élocution qu’Un Héros échappe à son pur programme tragique pour se doter d’une dimension sentimentale supérieure.

Image : Copyright Amirhossein Shojaei

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