« A Normal Family » de Hur Jin-ho

Dans « A Normal Family », le trop méconnu Hur Jin-ho brosse le portrait glaçant et vertigineux d’une société sud-coréenne en capilotade, à travers le conflit moral qui oppose deux frères irréconciliables.


a normal family
"A Normal Family" (c) Copyright 2024 Hive Media Corp & Mindmark

Il y a quelque chose de profondément tarantinien dans A Normal Family. La violence saisit à la jugulaire au détour de l’une de ces conversations a priori futiles qui jalonnent le quotidien. L’impression de déjà-vu ne doit rien au hasard. Le Dîner, roman du Néerlandais Herman Koch auquel le film de Hur Jin-ho emprunte son argument, s’ouvre sur une citation de Reservoir Dogs. Transposée en Corée du Sud, l’intrigue du best-­seller narre les tourments d’un avocat magouilleur et de son frère cadet, un chirurgien accroché à son éthique, mouillés à leur insu dans une affaire de meurtre crapoteux perpétré par leurs enfants, sociopathes en puissance.

Les répercussions de l’homicide menacent l’équilibre fragile de cette famille (presque trop) normale de cols blancs, vitrine d’un miracle économique en berne… Rodé à l’exercice du mélodrame, Hur Jin-ho s’aventure au-delà des frontières de la carte de Tendre pour baguenauder au « Pays de la politesse ». Perché sur les cimes du désespoir, le spectateur serre les mâchoires devant le spectacle grinçant et sarcastique de la faillite morale d’une nation entière vampirisée par le néo-libéralisme et le modèle méritocratique sur fond de délitement du confucianisme. Innocents ou misérables, les personnages d’A Normal Family dansent sur une ligne de crête par-delà le bien et le mal.

A Normal Family de Hur Jin-ho, sortie le 11 juin, Diaphana (1 h 49)