
Entrer dans l’enceinte de la rétrospective consacrée à Rick Owens, c’est comme entrer en religion. Au premier coup d’œil, tout semble sombre et brutal. Et à mesure que les yeux s’habituent, l’ensemble s’illumine d’une étrange beauté.
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La notion de temple, dans le titre de l’exposition « Temple of Love », n’a rien d’un hasard. Le créateur californien de 63 ans est un passionné de mythologie, qu’il réinterprète chaque saison dans ses défilés grâce à des mises en scène spectaculaires organisées au pied du Palais de Tokyo. Après les muses et leurs lancés de jasmin depuis les toits du musée, Rick Owens faisait, cette saison, défiler ses mannequins les pieds dans l’eau, directement dans les fontaines du musée.
Un grand baptême, sorte de messe noire qu’évoque la première salle de l’exposition, entièrement vêtue de feutre marron, matière que le designer affectionne tout particulièrement.
Cette première partie, consacrée à sa période américaine, est bercée en fond par la lecture du chef-d’œuvre de Joris-Karl Huysmans, À rebours. Un livre fondateur pour Rick Owens, qui relate l’histoire lancinante d’un dandy excentrique — à son image.

Avec des références allant du décadentisme à l’architecture brutaliste, du punk londonien au viel Hollywood glamour des films de Cecil B. DeMille et Fritz Lang, en passant par les démentes créatures qu’étaient Ziggy Stardust et Klaus Nomi, le travail de Rick Owens s’érige au sein du Palais Galliera comme une œuvre complexe et unique, à forte dimension sensorielle. Une exception dans le monde de la mode, habitué à la seule extase visuelle, et à laquelle la bien-nommée salle « La joie de la décadence » rend justement hommage. Âmes puritaines, s’abstenir.
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