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En écoute: « Quiet Signs », l’album ténébreux de la Californienne Jessica Pratt

  • Éric Vernay
  • 2019-03-05

La dernière fois que Jessica Pratt s’est fait entendre, elle traversait une zone de turbulences: déménagement de San Francisco à Los Angeles, séparation amoureuse, deuil maternel. C’était il y a quatre ans, une éternité. Si le retour de la Californienne a quelque chose de plus apaisé, les nuages demeurent. « Après deux longues années de tournées, je me suis sentie exténuée, physiquement et mentalement, confie la musicienne. J’étais vidée, je n’avais plus rien à donner. L’album explore ces ténèbres intimes, mais de manière moins frontale que sur le précédent disque, où j’étais dans une réaction spontanée de survie. Sur Quiet Signs, c’est plus contemplatif, moins désespéré. » Le décor, jusqu’alors dépouillé, s’est étoffé d’orchestrations, d’orgues, de flûtes, de cordes. Le disque s’ouvre sur quelques notes de piano rêveuses à la Erik Satie, sur un fil entre souffle pastoral et déprime urbaine. Puis, accompagnée de sa guitare, la trentenaire enroule ses neuf chansons dans un mouvement ondulatoire fascinant, aussi hypnotique que les rouleaux d’un torrent.

Un album construit comme un songe enfoui

Avec ce disque atemporel, Pratt s’inscrit dans la lignée des prêtresses folk du début des années 1970, Linda Perhacs, Sibylle Baier, Karen Dalton, Vashti Bunyan. Une ascendance éthérée qu’elle ne nie pas, ajoutant au passage quelques habitués de sa platine comme Scott Walker, Marianne Faithfull ou Burt Bacharach. Pratt fait sienne cette tradition racée de songwriters, à l’aune de son curieux grain vocal, qui, balayé par de lumineux arrangements, semble léviter. « En studio, l’ambiance était silencieuse, concentrée. Ça m’a fait penser à une scène de théâtre. Non que je sois actrice, je n’ai aucune expérience dans ce domaine. Mais je me suis rendu compte que j’avais écrit des chansons peu évidentes à chanter. Il fallait donc que je m’exerce durant l’enregistrement, comme une comédienne sur scène, qui essaie des choses pour trouver l’interprétation la plus juste. » Habitées, ses mélopées ont l’évidence troublante d’un songe enfoui.

SI TON ALBUM ÉTAIT UN FILM ? « Le premier morceau de mon album est une référence à Opening Night de John Cassavetes, un film que j’adore. Gena Rowlands est fantastique. Mais si mon disque était un film, l’actrice principale serait une inconnue. Ce serait un drame, un film d’auteur avec un côté abstrait. Et quelques notes d’humour également. Il serait question de combats intérieurs, d’introspection. Un film raconté à la première personne, du point de vue de l’héroïne. L’atmosphère y serait primordiale, avec des silences et un soin porté aux détails, comme chez Aki Kaurismäki. » Jessica Pratt

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