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« Slacker » de Richard Linklater

  • Esteban Jimenez
  • 2020-01-31

Deux avant d’exploser grâce à Génération Rebelle (1993), Richard Linklater signait avec Slacker son second long-métrage, véritable éloge de la marge annonçant déjà l’une des grandes préoccupations du cinéaste : l’écoulement du temps et ses effets.

Tourné en 1989 pour un budget dérisoire de 23 000 $, Slacker est une œuvre ubique, tour à tour légère et grave, fantasmée et réaliste. Richard Linklater y dresse le portrait de plusieurs personnages, d’âges et de milieux sociaux tous plus différents les uns des autres, dans une concaténation d’hasardeuses rencontres le temps d’une journée ensoleillée à Austin au Texas, ville natale du cinéaste. La séquence d’introduction – où Linklater himself interprète un jeune homme bavard qu’on ne reverra plus par la suite – résonne comme une invitation à voyager, à sauter vers l’inconnu. Mais plus encore, c’est une célébration de la logorrhée, dans laquelle le réalisateur/acteur expose sa conception du rêve et des multiples dimensions qui peuvent cohabiter puisque nous sommes « piégés dans notre propre réalité » dit-il.

Ce personnage sombre au royaume des songes dans un bus qu’il ne tarde pas à quitter. Le slacker (branleur) poursuit alors sa rêverie dans un taxi où, face à un conducteur totalement apathique, il élabore une théorie selon laquelle chaque pensée a une existence et une finalité propre. Chaque mouvement de l’esprit existerait et appartiendrait alors à une réalité alternative. What if ? Avec cette ouverture, Linklater nous avertit sur ce qui va suivre : on ne sait pas trop où l’on se dirige, on déambule, prenant une direction aléatoire, comme dans un rêve. Il n’y pas de début, on arrive en cours de chemin, saisissant l’instant présent, aussi fugace soit-il. Bien la trilogie Before, soit l’histoire, en trois parties, de la naissance et du délitement d’un couple, ou le film Boyhood, tourné sur douze ans, le cinéaste étire le temps, comme pour développer au mieux chacun des personnages rencontrés de manière impromptue. Linklater crée dans ce taxi un espace de liberté hors du temps, qu’on croirait suspendu alors qu’il s’écoule pourtant bel et bien.

Version restaurée de Slacker par Splendor Films le 29 janvier en salle.

Image: Copyright Splendor Films

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