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« Certains l’aiment FIP » explore les musiques des films de Jean-Luc Godard

  • Léa André-Sarreau
  • 2020-01-20

Sous ses airs intellos, JLG a aussi, à travers les bandes originales de ses films, fait la synthèse entre musique populaire et savante, entre art et contestations politiques. Certains l’aiment FIP nous le rappelle brillamment dans ce podcast dédié au cinéaste-mélomane.

Penser à la filmo de Jean-Luc Godard, c’est d’abord entendre résonner de célèbres répliques. Mélancoliques (« C’est lorsque les choses finissent qu’elles prennent un sens » dit Bruno Putzulu dans Éloge de l’Amour), anarchistes (« Si vous n’aimez pas la mer… si vous n’aimez pas la montagne… si vous n’aimez pas la ville… allez vous faire foutre ! » résume Michel Poiccard/Jean-Paul Belmondo dans Pierrot le Fou), métas (« La photographie, c’est la vérité et le cinéma, c’est vingt-quatre fois la vérité par seconde » dans Le Petit Soldat): les dialogues -ou monologues- chez JLG sont comme des bribes d’âmes.

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Mais ce grand magicien des images et des mots, sous sa carapace de cérébral dandy, a aussi une fibre mélomane. La preuve avec cette émission de Certains l’aiment FIP consacrée à la musique dans ses films. Au fil de ce podcast de plus d’une heure, on réapprend à tendre l’oreille pour saisir tout le spectre mélodieux qui parcourt discrètement ses œuvres les plus connues. C’est la partition lancinante du pianiste de jazz Martial Solal, légère puis soudainement si grave, qui ponctue les travellings d’A bout de souffle; la chanson faussement naïve d’Angela dans Une Femme est une femme sur une musique de Michel Legrand, le thème de Camille composé par Georges Delerue dans Le Mépris -un adagio amer qui épouse le lent délitement du couple Piccoli/Bardot.

Godard et la musique, c’est aussi une collaboration fusionnelle avec le compositeur Antoine Duhamel, qui a travaillé sur Pierrot le fou, Made in USA et Week-end. Après avoir vu Masculin Féminin en 1966, Duhamel dira de Godard qu’il admire son « intelligence musicale », la qualifiant de « moderne et iconoclaste » -il suffit de voir la façon dont le réalisateur juxtapose les silences des partitions de Beethoven pour en déconstruire la mélodie. Expérimental, le travail de JLG sur la musique est aussi une façon de dynamiter les codes classiques, de faire s’entrechoquer le son et les images pour les libérer de leur pesanteur narrative.

Organique, chaque extrait sonore trouve chez lui une place minutieusement réfléchie: «  manipule lui-même le levier à musique. Il se comporte moins en mixeur qu’en véritable chef d’orchestre. Chaque décision sonore de Godard a du sens «  explique Duhamel, qui a observé lors du mixage de Week-end son travail d’orfèvre. Enfin, n’oublions pas que Godard, l’air de rien, a la fibre rock’n’roll. En 1968, dans son documentaire Sympathy for the Devil, il filme l’enregistrement du célèbre titre des Rolling Stones, une séquence qu’il fait ensuite dialoguer avec des prises de vue des manifestations des Black Panthers dans la rue. Chez Godard, l’art rime toujours avec politique.

Image: Capture d’écran Youtube

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