
Le pari était osé. Transposer sur scène le cinéma enchanté de Jacques Demy en redonnant vie à la poésie tendre des zigzag amoureux dans les rues de Rochefort de deux sœurs jumelles, nées sous le signe des Gémeaux. Faire entendre en live les mots doux et les airs qui swinguent d’un film devenu le « doudou » de beaucoup de cinéphiles. Et pourtant, chaque soir dans l’écrin fabuleux du Théâtre du Lido, la magie Demy opère.
Joyeux et entraînant, ces Demoiselles de Rochefort n’ont rien à envier aux anciennes meneuses de revue de ce haut lieu du spectacle parisien, réinventé depuis deux ans avec succès en temple de la comédie musicale. Paillettes, claquettes, chorégraphies endiablées, décors qui se transforment à vue, tout est là pour assurer le show. Abordant cette adaptation scénique avec la juste dose de révérence et de réinvention, l’adaptation étonne et émerveille.
De la couleur, de l’humour, du romantisme, un soupçon de mélancolie, la musique de Legrand en live… Tout Demy est là dans cette façon de faire les choses en grand et de prendre le spectateur par-là main, de l’inviter à jouer, à être complice de ces histoires d’amour où les forains dansent et les marins peignent l’amour.
Et tandis que, façon Hollywood, les lettres illuminés de Rochefort se déploient tout le long de ce décor en scope, que la troupe brille de mille feux, que tout se métamorphose sur scène en à peine un pas de danse, Broadway et Demy ne font qu’un. Lui qui avait rêvé ce film comme un hommage à la comédie musicale américaine, c’est soudain le musical qui s’empare de ses demoiselles. Alors, Maxence, Solange, Delphine, Monsieur Dame, Boubou et tous les autres prennent vie devant nous, comme dans un songe, un moment irréel, définitivement hors du temps. Une réussite.