
Nizar et Achraf, jeunes bergers de la même famille, se trouvent en montagne avec leurs chèvres quand ils sont violemment attaqués par un groupe terroriste. Rescapé, le second parvient à rejoindre ses proches, la tête de son cousin dans un sac, voyageant entre douleur insoutenable et sidération sourde.
En des scènes d’un onirisme touchant parfois au sublime, Nizar lui sert de guide – étoile du berger à la disparition inconcevable. « Les morts savent tout, ça ne sert à rien de mentir », lance avec aplomb un personnage au détour d’une conversation. Lotfi Achour – par ailleurs metteur en scène de renom – adapte précisément ce précepte à sa mise en scène, jusqu’à adopter à plusieurs reprises le point de vue subjectif d’Achraf, dans un rapport brut à un monde que l’adolescent ne parvient plus à décoder. Puis, comme empruntés au regard du défunt, des plans larges viennent signifier les impressionnantes échelles entre la minuscule figure d’Achraf et la majesté d’une nature impétueuse, tout autant que l’isolation du hameau où ploie sa famille, terrassée par le deuil.
Le soin avec lequel le film navigue dans cette période de trouble, aussi intime que politique, remet ces populations rurales oubliées sur la carte et rend un hommage vibrant au jeune berger Mabrouk Soltani, assassiné en 2015 dans la montagne de Mghila.
Les Enfants rouges, de Lotfi Achour, 1h38, Nour Films, sortie le 7 mai