
La petite ville de Banpo, au nord-est de la Chine, est frappée par des meurtres en série. Le chef de la police criminelle Ma Zhe enquête mais très vite, il est démuni, car une arrestation a lieu, et une série d’indices l’amènent à douter de l’inculpation… Le cinéaste Wei Shuju fait vaciller tous nos repères pour installer une atmosphère de doute larvé – l’intrigue labyrinthique, insondable, suit alors la spirale paranoïaque qui gagne peu à peu le héros, qui se sent de plus en plus isolé de ses pairs, un peu comme dans le récent Decision To Leave de Park Chan-Wook ou encore Inherent Vice de Paul Thomas Anderson. Le cinéaste joue alors de la dégaine de son héros, l’apathie rampante, le blouson en cuir brillant qui se patine… Avec beaucoup d’invention formelle, il nous plonge dans ses rêves qui rejouent l’un des meurtres comme un tourment tenace, explorant toutes les configurations qui ont pu mener au drame.
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Seul contre tous, Ma Zhé doit faire face à une institution policière dont Wei Shujun fait ressortir l’esprit de clan, la tendance à maquiller les défaillances. Celle-ci apparaît moins apte à se tourner vers un idéal de justice qu’à travailler seulement pour faire du chiffre. Comme beaucoup de cinéastes chinois, Wei Shujun ruse avec la censure qui refuse que l’on ternisse la nation chinoise. En situant son intrigue à une époque passée – les années 1990, celles qui voient la Chine post-communiste muter vers un capitalisme et nationalisme toujours plus dur – pour qu’on saisisse ce qui, dans sa critique, travaille encore la société chinoise.
Le Festival de Cannes se tiendra cette année du 16 au 27 mai 2023.
Image (c) KXKH Films
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