Le nouveau : Luc Battiston

Au milieu des forêts landaises, le cinéaste réalise des courts métrages sensoriels (Si la photo est bonne, Mon cœur s’invente des souvenirs) qui saisissent la matière des plus entêtants fantasmes.


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Cheveux blancs, air juvénile, il nous a donné rendez-­vous au parc des Beaumonts à Montreuil. Un coin de verdure loin des forêts labyrinthiques de ses films dans lesquelles on aime se perdre. L’ancien comédien (il a fait le cours Florent et a joué chez Philippe Faucon) né en 1983 est originaire de Nice et vit à Saint-Ouen. C’est pourtant au Pays basque qu’il s’est trouvé en tant que cinéaste, revisitant le folklore du Sud-Ouest plutôt viril (avec ses ferias et son rugby), tordant celui-ci à travers un homo­érotisme très personnel.

Dans ses courts, le réalisateur part en quête de fantasmes. Comment se les formule-t-on ? Comment viennent-ils à nous ? « J’essaye de les rendre tangibles et organiques », dit-il. Dans Si la photo est bonne (2016), il plonge dans ceux d’un père de famille s’épanouissant dans une sublime scène de cruising gay à la Demy dans laquelle les amants chantent du Barbara. Mon cœur s’invente des souvenirs (2020), encore plus onirique, se projette dans les fantasmes d’une femme sur les traces d’un homme en infinie métamorphose. Celui qui termine l’écriture de son premier long (« sur un chasseur landais pris dans une obsession amoureuse ») a pour ce court en 16 mm été inspiré par une phrase du philosophe Paul B. Preciado (tirée d’Un appartement sur Uranus) qui le reflète bien : « Il ne s’agit pas de considérer que la vie est un rêve, mais bien de comprendre que les rêves sont aussi une forme de vie. »

Photographie : Julien Liénard pour TROISCOULEURS