
Les premières images de Reedland laissent planer un doute sur l’époque à laquelle se déroule le premier film de Sven Bresser. Est-ce bien de nos jours qu’un paysan plus tellement dans la force de l’âge, mais conservé par l’habitude de l’âpreté du métier, fauche des roseaux à la main ? Johan, le personnage principal, semble vivre hors du temps et de la société dans ces paysages battus par les vents et l’eau, colonne vertébrale d’un long métrage sensoriel.
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Lorsqu’il trouve dans ses champs le cadavre dénudé d’une adolescente, le reste du monde se rappelle à lui de la plus troublante des manières. Car dès lors, ce grand-père, jamais avare en temps passé à bricoler des costumes improbables à sa petite-fille pour son spectacle scolaire, oscille entre enquêteur non habilité et coupable tout désigné.
Cette dualité entêtante est servie par une mise en scène rigoureuse. En quelques secondes, lorsque la tempête s’écrase sur cette campagne inhospitalière, Johan passe du papy protecteur au voisin inquiétant. L’acteur Gerrit Knobe a le physique de l’emploi, mains calleuses qui pourraient briser une nuque sans effort et visage impénétrable. La caméra en épouse chaque ride, chaque angle sec, l’enferme dans un miroir ou y projette une lumière douce pour mieux troubler le spectateur. Et le film n’est jamais aussi beau que lorsque la nature reprend ses droits et fait disparaître son colosse derrière les roseaux et le sifflement du vent.
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