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« L’Ombre d’un mensonge » de Bouli Lanners : mémoire trouble
- Raphaëlle Pireyre
- 2022-03-21
Avec « L’Ombre d’un mensonge », Bouli Lanners quitte la belgitude des zones périurbaines et ses losers attachants pour les grands espaces du nord de l’Écosse. Il s’y éprend d’une femme mystérieuse jouée par Michelle Fairley, la Catelyn Stark de « Game of Thrones ».
Venu du continent, Phil vit seul sur l’île de Lewis, au nord de l’Ecosse. Il perd la mémoire à la suite d’un AVC et n’a aucun souvenir de la liaison secrète qu’il est censé avoir entretenue avec Millie, femme discrète et serviable qui prend soin de lui à son retour de l’hôpital…
Bouli Lanners prête son physique d’ours pataud à cet homme perdu dans le brouillard de sa mémoire. Après avoir réalisé un conte moderne (Les Géants), et un road movie presque immobile (Les Premiers, les derniers), l’acteur-cinéaste imagine la passion d’un couple au mitan de la cinquantaine du point de vue de la femme amoureuse, faisant ainsi repentance de l’absence de personnages féminins de ses films précédents. Dans cette communauté presbytérienne rigide, il filme avec délicatesse le désir de corps intimidés et contraints.
Au cœur des intérieurs sombres, les faux-semblants de cette liaison surgissent à chaque reflet dans lesquels se dédoublent le réel et son fantasme. Mais ce sont les décors naturels de l’île, petit caillou du bout du monde battu par les éléments, qui expriment le mieux la densité des sentiments des personnages. Épaulé à la réalisation par Tim Mielants, Bouli Lanners laisse éclater dans sa mise en scène un romantisme inaccoutumé, presque classique et tout britannique.
L’Ombre d’un mensonge de Bouli Lanners, Ad Vitam (1 h 39), sortie le 23 mars.
Image : © Versus production