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A voir sur OCS : « Gentlemen & Miss Lupino » de Julia et Clara Kuperberg

  • Olivier Marlas
  • 2021-10-23

Pionnière du cinéma et de la télévision, actrice insatisfaite puis réalisatrice indépendante dans l’Amérique de l’après-guerre, Ida Lupino est l’une des grandes oubliées de l’histoire hollywoodienne. Ce documentaire inédit exhume son œuvre prolifique.

Un documentaire de facture assez classique, agrémenté d’images d’archives et d’analyses filmiques dévoilant une cinéaste au style limpide et aux thèmes avant-­gardistes, injustement méconnue alors qu’elle a pourtant sondé la société américaine des années 1940 et 1950 avec une audace folle. Sans doute nécessaire pour arracher une telle artiste aux limbes de la mémoire, ce souci de pédagogie illustre aussi le travail minutieux des sœurs Julia et Clara Kuperberg, documentaristes françaises spécialisées dans l’étude et la déconstruction du mythe hollywoodien. Un an après la ressortie en salle de quatre films clés d’Ida Lupino, voici l’occasion de mieux saisir la singularité d’une œuvre riche et cohérente, dans laquelle les petits budgets n’entravent pas les grandes idées, et les personnages féminins, à mille lieues des icônes glamours produites par l’âge d’or du cinéma américain, bataillent avec les tragédies du quotidien (agression sexuelle, polio, grossesse non désirée).

HISTOIRE(S) DU CINÉMA — Ida Lupino : une cinéaste battante dans le Hollywood des fifties

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En 1950, Outrage est d’ailleurs l’un des premiers longs métrages à aborder directement la question du viol du point de vue de la victime, en capturant le sentiment de honte et de culpabilité qui peut en découler. À l’époque du code Hays, interdisant jusqu’à la prononciation du mot « viol », cette exploration des consciences meurtries est d’autant plus fascinante qu’elle renvoie à l’idée d’une Amérique cachée, malade de son puritanisme et de ses mensonges, qui valorise les femmes concernées par l’effort de guerre avant de les renvoyer vers la sphère domestique, sans plus de considération.

Comme le montre le documentaire, notamment par le biais du surprenant Jeu, set et match, dans lequel une mère, désabusée par son mariage étroit, pousse sa fille à privilégier sa carrière naissante dans le tennis au détriment d’une vie rangée, Ida Lupino balaye l’idée du rêve pour tous et du consumérisme heureux. On pourrait la qualifier de féministe, mais elle a toujours refusé ce terme, préférant tisser le fil d’histoires complexes (à ce titre, Bigamie est un modèle d’ambiguïté). Seule femme membre du syndicat des réalisateurs américains en 1950 et à la tête de sa société de production The Filmakers, Ida Lupino reste une merveilleuse anomalie qui mérite d’être redécouverte.

« Gentlemen & Miss Lupino » de Julia et Clara Kuperberg, le 23 octobre sur OCS.

Image © Copyright Bison Films

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