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FLASH BACK · « Virgin Suicides » de Sofia Coppola ressort en salles

  • Damien Leblanc
  • 2020-09-25

Le film de Sofia Coppola demeure profondément culte depuis sa sortie en 1999. Révolutionnant le genre du teen movie, la cinéaste opérait en effet un puissant renversement du regard qui a fait école.

Premier long métrage de Sofia Coppola, Virgin Suicides fut projeté en 1999 à la Quinzaine des réalisateurs cannoise avant de sortir en France le 27 septembre 2000. Récit du destin tragique de cinq sœurs adolescentes dans une ville américaine tranquille durant les années 1970, le film reçut d’excellentes critiques. « Virgin Suicides est sorti en plein renouveau des productions teen, après les succès de Cluelessde Scream ou d’American Pie. Mais il se présentait en rupture avec eux », explique Célia Sauvage, chercheuse et coautrice (avec Adrienne Boutang) du livre Les Teen Movies (Vrin, 2011). « Le film renouait en effet avec la tradition des teen movies nostalgiques ne se déroulant pas dans un cadre contemporain, comme Grease, American Graffiti ou Retour vers le futur. Mais il s’attaquait aussi à un élément fondamental du genre : la banlieue pavillonnaire, qui ici n’incarne pas l’image d’une communauté et de familles soudées ou aimantes, Sofia Coppola exhibant l’hypocrisie et l’oppression qui règnent dans ce décor sacré de l’idéologie américaine. »

« Si le roman de Jeffrey Eugenides adoptait le point de vue de narrateurs masculins, le film le déconstruit en montrant comment les adolescentes sont enfermées par ce male gaze. »

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De fait, loin des « stratégies de préservation idéologique de l’adolescence », le film annonce d’emblée qu’on ne survit pas à l’adolescence. De quoi faire date ? « L’industrie cinématographique n’accueille jamais à bras ouvert des femmes réalisatrices. Sofia Coppola a eu le privilège d’être “la fille de“, mais la véritable révolution silencieuse de Virgin Suicides repose sur ce qui aujourd’hui a meilleure presse, le female gaze. Si le roman de Jeffrey Eugenides adoptait le point de vue de narrateurs masculins, le film déconstruit ce point de vue en montrant comment les adolescentes sont enfermées par ce male gaze qui les réduit, au choix, à des vierges (mystifiées et innocentes) ou à des putains (sexualisées et objets de leurs fantasmes). Et Sofia Coppola donne à voir en parallèle un female gaze : son propre regard sur ces adolescentes, ainsi que le point de vue subjectif de ces dernières. » Ce qui fit école. « Le statut acquis par la cinéaste a permis à d’autres réalisatrices de trouver leur place dans le genre du teen movie sans effrayer les financiers : Catherine Hardwicke et le succès du premier Twilight ou Greta Gerwig et sa nomination à l’Oscar de la réalisation pour Lady Bird. Et Sofia Coppola continue à réaliser des films vingt ans après, ce qui relève quasi de la mission impossible au sein d’une industrie aussi sexiste. »

Illustration de couverture : Anna Wanda Gogusey

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