- Critique
- Article
- 3 min
« Los Reyes del Mundo » : dernière virée avant l'enfer
- Margaux Baralon
- 2023-03-24
[Critique] Cet intense deuxième long métrage de la cinéaste colombienne Laura Mora (après « Matar a Jesús » en 2019) suit le voyage éprouvant, de Medellin à l’arrière-pays, de cinq adolescents à la recherche d’une terre promise. Avec en filigrane un regard sévère porté sur la Colombie, pays pétri par les inégalités et la violence.
Los reyes del mundo commence dans une ville déserte, nimbée de bleu, qui semble s’éveiller doucement. Jusqu’à ce qu’un métro traverse l’image à toute berzingue et que le vacarme de la ville fasse vriller les tympans. Cette ville, c’est Medellin. Orphelin, Rà s’y balade sur une mobylette défoncée, toujours la machette à portée de main.
Lorsque le garçon reçoit une lettre du gouvernement lui annonçant qu’il va pouvoir récupérer la terre qui appartenait à sa grand-mère, autrefois préemptée par des milices paramilitaires, il embarque quatre amis pour traverser le pays. L’odyssée sera surprenante et périlleuse. Derrière le destin de ces héros qui n’en sont pas, se dessine tout un pays, fascinant et dangereux, perclu d’inégalités, dans lequel les jeunes hommes semblent ne pouvoir hériter que de la violence. Laura Mora préserve quelques instants suspendus, qui empêchent son film de sombrer dans le dolorisme.
Il y a cette escale dans une sorte de maison close au milieu de nulle part, où les ados trouvent des bras réconfortants pour les enlacer. Cet espoir aussi, symbolisé par un mystérieux cheval, qui les pousse toujours plus loin sur la route. Ce jeu sur les changements d’atmosphère répond à celui sur le son. Et l’on sait d’avance que, après le silence cotonneux, le chaos reprendra ses droits.
Los reyes del mundo de Laura Mora, Rezo Films (1 h 51), sortie le 29 mars
Image (c) Rezo Films