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CANNES 2023 · « Un Prince » de Pierre Creton , un herbier sensuel

  • David Ezan
  • 2023-05-19

Dans un film radical présenté à la Quinzaine des cinéastes, le plus rural des réalisateurs français tisse un conte hédoniste dont on devine la teneur autobiographique. Et transforme à nouveau son Pays de Caux en territoire de cinéma, où tous les fantasmes sont permis.

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Il était temps que Pierre Creton soit honoré au Festival de Cannes, lui dont l’œuvre singulière ne cesse de défier les lois industrielles – et esthétiques – du cinéma. Depuis une vingtaine de films, celui qui mène une double vie d’ouvrier agricole et de cinéaste travaille en effet à conjuguer ces deux mondes : celui de la terre, des bêtes, des plantes et celui de l’art. On pourrait dire aussi : celui de la chair et celui des mots ; celui du tangible et celui des idées. De Secteur 545 (2005) au sublime Va, Toto ! (2017) qui l’a fait connaître d’un plus large public, Creton filme le monde rural – son monde – comme on le voit trop peu au cinéma ; autrement dit comme un flux intarissable de vitalité et de désir. C’est bien le propos d’Un prince, qu’il porte cette fois à un rare degré d’érotisme. Le tout via le destin de l’apprenti jardinier Pierre-Joseph, un éphèbe avide de plantes et de sexualité. Enfant impur d’Alain Guiraudie et du couple Straub/Huillet, le film est moins radical par son sujet que par sa forme : ainsi la vie de Pierre-Joseph est-elle quasi exclusivement contée en voix off, par Françoise Lebrun et Mathieu Amalric notamment.

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Les images resteront muettes, comme pour les délester du poids des mots. Les rendre aussi à leur pureté figurative, à l’instar de la peinture. Et si ce coming-of-age d’un nouveau genre a quelque chose de l’herbier sexpérimental, il évoque ces fresques picturales où l’on gravait la vie des saints. Véritable hagiographie, Un prince fait feu de tout bois pour construire sa légende : à l’entrelacement des mains et des langues répond celui des fleurs et des sexes, des vagues et du vent. D’un plan, d’une coupe, Creton nous révèle alors un monde qu’on croyait disparu ; un monde où l’harmonie du vivant est telle qu’on croirait n’avoir jamais observé les arbres ni la mer avant cela. Telle que le désir y prend des formes inattendues, à rebours des normes esthétiques en vigueur. C’est que la radicalité tous azimuts du cinéaste n’a d’égal que son indépendance, lui qui travaille avec de rares mais fidèles compagnons de route. Celle qu’il trace apparaît en tout cas l’une des plus stimulantes du cinéma contemporain.

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Le Festival de Cannes se tiendra cette année du 16 au 27 mai 2023.Tous nos articles sur l’événement sont à suivre ici.

Image (c) andolfi

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