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« Notturno » : les affres de la guerre

  • Éléonore Houée
  • 2021-09-20

Aux frontières de l’Irak, du Kurdistan, du Liban et de la Syrie, Gianfranco Rosi capte la détresse commune des populations locales, victimes de la tyrannie de diverses entités depuis des décennies. Formellement brillant, "Notturno" est une suite de compositions picturales et sonores sur les affres de la guerre.

Le réalisateur Gianfranco Rosi sera présent pour une discussion après la séance de 19h55 de Notturno au mk2 Quai de Seine, le mercredi 22 septembre. Réservez votre place ici.

Alors qu’il filmait l’éloignement des êtres dans Fuocoammare. Par-delà Lampedusa (2016), l’Italien Gianfranco Rosi rapproche, dans ce nouveau documentaire, des individus qui ne se côtoient pas ordinairement mais qui subissent tous les désastres causés par plusieurs décennies meurtrières. Sans connaître les langues ni les territoires des peuples rencontrés, c’est étonnamment seul qu’il a fabriqué les splendides images de Notturno.

Ces dernières, pareilles à des tableaux dans leur composition lumineuse et leur cadrage figé, détonnent par rapport aux représentations habituelles du Proche Orient. Ainsi, l’aridité des paysages à laquelle on pourrait s’attendre s’avère absente : c’est la pluie et ses flots dévastateurs qui rongent les routes, mais les populations locales défient la détérioration de ces chaussées en les traversant coûte que coûte. Paysagiste autant que portraitiste, le réalisateur filme aussi la douleur des habitants. Là, une mère pleure son fils assassiné dans une prison abandonnée ; ailleurs, un enfant yézidi commente ses propres dessins ensanglantés par le terrorisme islamiste dont il a été victime.

D’autres sont plus mutiques, comme Ali, alter ego de Samuele dans Fuocoammare, tandis que dans une autre contrée des soldates kurdes surveillent muettement l’horizon, à l’affût des troupes de Daech. Nous entrevoyons alors leurs peines sur leur visage taiseux. Même si les combats n’apparaissent pas directement à l’écran, les échos des armes à feu tapissent les conversations d’un couple ou la pêche silencieuse d’un homme sur les eaux d’un marécage éclairées par les flammes enragées de puits de pétrole, comme s’il naviguait sur les rives du Phlégéthon. Prenant modèle sur le tempo lento des Nocturnes de Frédéric Chopin (auquel le titre du film fait référence), le documentariste transforme ces sourdes lamentations en une mélodie étouffée de la guerre.

Notturno de Gianfranco Rosi, Météore Films (1 h 40), sortie le 22 septembre

Image : Copyright Météore Films

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