
Il y a dans ce premier film quelque chose de flottant qui happe avec intensité — qui tient à la douceur du souvenir qu’on ne veut pas sentir s’effacer. Lavigne ouvre son récit (qui se passe dans le Paris du début des années 1990) dans une atmosphère froide, clinique : c’est au téléphone, depuis le laboratoire où il travaille, que Julien apprend la disparition de Christophe (Isaak Dessaux, spotté dans notre dernier numéro « Nos 25 de moins de 25 »). Plus tard, on comprendra que celui-ci était atteint du sida, rongé aussi par une profonde dépression.
Après la sidération, la peine, Julien recompose les fragments d’une histoire à peine entamée, les éclats d’un amour naissant, balayé par la violence d’une époque qui sourd hors champ — clandestinité, honte, peur, homophobie, sérophobie.
Mais plutôt que de s’attarder sur les douleurs, Lavigne choisit de célébrer la fulgurance de la rencontre : la sensualité, le mystère, l’excitation, les couleurs, la musique. Il imagine un espace liminaire, évanescent, pour accueillir cette mémoire suspendue : une banlieue parisienne rêvée, traversée de slows infinis, de lumières électriques, et d’étreintes fiévreuses.
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