
Certain·e·s cinéastes s’imposent comme une évidence. C’est le cas de Diego Cespedes, la trentaine à peine, et déjà repéré par Cannes à travers ses courts métrages. Il débarque à Un Certain Regard avec son attendu premier long au titre aussi envoûtant qu’évocateur, Le mystérieux regard du flamant rose. Il nous y emmène au Nord du Chili, dans un village minier, au début des années 1980. Là, au milieu de nulle part, un cabaret réunit une communauté queer qui fait le show aux mineurs esseulés.
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C’est dans ce contexte que grandit Lidia, 11 ans, auprès de sa mère adoptive, Flamant Rose, drag queen. Alors qu’une étrange « peste » se répand dans la région, l’un des « travestis » (terme générique utilisé à l’époque) est assassiné, jugé responsable. La jeune fille décide de ne pas en rester là et se lance dans une quête aussi bien de vengeance que d’apprentissage.
Comme un croisement bouleversant entre Priscilla, folle du désert, la série It’s a sin et un western fordien, Le mystérieux regard du flamant rose prend aux tripes et au coeur. Sublimé par les grands espaces désertiques et un réalisme magique enveloppant, le film nous entraîne dans un conte, aussi cruel que merveilleux (comme tout bon conte), sur l’ostracisation et la violence de l’ignorance, s’inspirant des rumeurs sur les malades du Sida à l’arrivée de la maladie. Cependant, à la dureté, il préfère la tendresse.
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Diego Cespedes imagine ce cabaret comme un Fort Alamo de la tolérance où l’on vendra chère sa peau, un dernier bastion de l’altérité dans un monde qui ne souffre pas qu’on s’éloigne de la norme. Le film croit au pouvoir du savoir et de la rencontre, discours salvateur dans notre actualité qui l’est moins, et le partage avec les armes affûtées du cinéma. Mais, surtout, Le mystérieux regard du flamant rose fait l’éloge de l’amour, à tous les âges et sous toutes ses formes, persua- dé qu’il s’agit du seul regard convenable de porter sur l’autre.
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