
Dans Girls, qui semble être une source d’inspiration importante pour I Love L.A., Hannah, l’héroïne, pense être la voix de sa génération. Pensez-vous être la voix de la génération Z aujourd’hui ?
Girls [de Lena Dunham, diffusée de 2013 à 2017 sur HBO] est l’une de mes séries préférées. Alors que j’étais au lycée, je me souviens avoir visité l’université de New York avec mon père et nous avions regardé Girls. C’était l’épisode dans lequel Hannah couche avec un médecin dans un appartement tout le week-end. Résultat, mon père m’a dit que je pouvais regarder ça sans lui. De mon côté, j’étais fascinée, je me suis dit que ma vie allait ressembler à ce que je voyais. Donc bien sûr je m’inspire beaucoup de cette série, comme d’Atlanta [série de Donald Glover qui narre le quotidien de deux jeunes Afro-américains, ndlr]. Je voulais aussi faire un Entourage pour it-girls. À la fin, j’espère avoir trouvé un ton unique. Mais la voix de cette génération Z, c’est probablement quelqu’un sur TikTok en train de poster des vidéos de Skibidi Toilet [inspirées d’une websérie, ces vidéos mettent en scène une tête parlante qui sort d’une cuvette, ndlr]. Ce n’est pas moi. Je suis sur TikTok mais je ne fais pas de vidéos de Skibidi Toilet qui changent la vie des gens, malheureusement.
Que ce soit dans vos sketchs d’humoriste, vos films ou votre série, vous avez été une vingtenaire en questionnement existentiel permanent. Cet âge-là a-t-il remplacé la quarantaine pour entrer en crise ?
Je pense qu’il est difficile d’être diplômé et de chercher un job en sortant du Covid-19 et alors qu’il y a des grèves et un gouvernement en déroute – je parle du gouvernement américain, pas du vôtre. Tout ça créé le sentiment de n’avoir aucun ancrage, d’être un hamster dans sa roue et d’avoir perdu cinq ans de sa vie. Et puis à la fin de sa vingtaine, on connaît le « saturn return ». En astrologie, cela désigne le moment où tout ce que vous avez fait pendant votre vingtaine est secoué : si vous êtes en couple avec quelqu’un alors que vous n’êtes pas faits l’un pour l’autre, vous vous séparez, si votre job ne vous convient pas, vous vous faites virer. L’univers vous secoue comme une boule à neige et normalement, vous êtes censés atterrir ensuite à votre juste place.
Une femme bisexuelle dans Shiva Baby, une lesbienne dans Bottoms… vous avez incarné plein de personnages queer et vous en écrivez de nouveau plusieurs dans I Love L.A.
J’essaie simplement de représenter les gens que je connais. Ce qui a changé pour ma génération est peut-être précisément qu’il ne s’agit pas d’un effort conscientisé, mais que cela vient naturellement.
Qu’est-ce qui vous intéresse dans le fait de jouer ou imaginer des personnages souvent sans limite, voire mal aimables ?
Je mets un peu de moi dans chacun de mes personnages. Aucun n’est parfait parce que personne ne l’est dans la vraie vie. C’est quelque chose dont j’ai pris conscience il y a un an et demi. Je ne plaisante pas ! Avant, je pensais que les gens étaient soit bons, soit mauvais. Et en fait c’est faux, ils sont nuancés et pleins de failles. Bon ok, certains sont vraiment démoniaques mais en règle générale, j’essaie d’approcher mes personnages avec empathie. Il faut que les gens puissent se reconnaître en eux, certains aspects qu’ils aiment, d’autres moins aimables, mais dans tous les cas qu’ils aient une forte personnalité. Et surtout, qu’ils soient fun.