Délicat, introspectif, le nouveau
film de Xavier Dolan capte avec finesse les élans les plus discrets
du désir entre deux amis.
Après son expérience américaine Ma vie avec John F. Donovan, Xavier Dolan revient à un pan plus intimiste de son œuvre, en tournant entre amis, dans des décors québécois qu’il connait mieux, avec des thématiques qui lui sont chères : les désirs réprimés, les relations évoluant imperceptiblement, les corps qui s’attirent de manière impérieuse.
Si Matthias et Maxime, comme on pouvait s’y attendre, porte bien cette vigueur propre aux films de bande, avec l’agitation et la cacophonie qu’implique le fait de s’approcher d’un clan de jeunes surexcités au seuil de la trentaine (comme dans les meilleurs Dolan, on s’envoie des scuds avec délectation), on est surtout impressionnés par la manière dont le cinéaste canadien y est attentif aux mouvements les plus impalpables de l’attirance entre Matthias (la révélation Gabriel D’Almeida Freitas, tout en retenue) et Maxime (Dolan lui-même, dans une composition ultra sensible), deux amis qui, après avoir perdu un pari, doivent échanger un baiser devant la caméra d’une étudiante en cinéma, baiser a priori anodin qui va pourtant les amener à redéfinir toute leur relation.
Xavier Dolan sait faire une pause dans le chaos ambiant pour se recentrer sur le moindre tremblement de lèvres, sur les oeillades fuyantes, sur les gestes fragiles et hésitants, bref sur les plus infimes vibrations qui traduisent le vacillement intérieur de ces deux potes qui jusque là se sont apparemment toujours identifiés comme hétéros. Dans ses précédents films, le cinéaste usait souvent du ralenti pour attraper et fixer ces ballotements de sentiments : il y en a bien encore ici, mais Dolan semble faire plus confiance à la force d’incarnation de son cinéma, il verse donc moins dans l’effusion, plus dans la pudeur et le mystère en se concentrant avant tout sur les visages, sur tout ce qu’il y a entre les silences.