
Dérivé du ragga et du dancehall jamaïcains, le shatta mélange des lignes de basse profondes et des percussions minimalistes, laissant place à des toasts qui décrivent la violence sociale et la recherche du plaisir (principalement sexuel, avec un langage cru). Grâce au hit viral « Tic » (2021) et à son featuring remarqué sur « Laptop » de Kalash, la chanteuse martiniquaise Maureen est devenue une figure de proue du shatta. Une artiste qui affirme sa liberté artistique en réinvestissant les codes esthétiques sexualisés du genre, valorisant le consentement et la légitimation des femmes dans un univers musical majoritairement phallocrate.
Sur son premier album, Queen, elle applaudit « avec les fesses » sur les rythmiques trépidantes du titre « Émoji pêche »(featuring Konshens, une des grandes voix du dancehall) ou invite une amie à goûter « un peu de mes lèvres » sur la ballade romantique « Ensemble ». Sur« War Queen », elle clashe une rivale : « T’es collée à mon cul comme un jean taille basse / Je sais que, dans tes rêves, tu me piques ma place. » Quand les titres « Kilimanjaro » ou « Allo » (featuring Naza) suintent le porno.
Mais, surtout, qu’elles soient dansantes ou intimistes, syncopées ou toutes kickées, ces chansons volcaniques inventent quasiment une nouvelle langue, hybridant français, anglais et créole dans des scansions frénétiques qui jouent avec des sonorités percussives (« Pop, top, flop, hop » sur « Dem mi to », « Tic tic tic » sur « Automatic ») et des ad libs réverbérés jusqu’à l’abstraction. À 26 ans, la topliner polyglotte n’hésite pas à suivre ses modèles Shenseea ou Rihanna pour s’asseoir sans complexes sur un trône de queen, bien décidée à ne plus jamais laisser personne la rabaisser ni lui retirer sa couronne.
Queen (Because)