
« Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? » La réplique d’Arletty dans Hôtel du Nord de Marcel Carné (1938) est une invention du dialoguiste Henri Jeanson, qui ne figure pas dans le roman du même nom d’Eugène Dabit dont le film est inspiré. Publié neuf ans plus tôt, ce classique de l’entre-deux-guerres reparaît aujourd’hui dans une magnifique édition grand format, illustrée par le dessinateur Christian Cailleaux.
Si vous ne l’avez jamais lu, ou si vous cherchez un beau-livre à offrir à Noël, c’est à ne pas manquer. Inspiré des souvenirs de Dabit dont les parents tenaient à Paris, quai de Jemmapes, un hôtel baptisé Hôtel du Nord (classé, le bâtiment abrite aujourd’hui un restaurant), ce roman-chronique a conservé toute sa poésie, sa tristesse, son pouvoir d’évocation du Paris populaire de l’époque, avec les petits métiers, la gouaille, les détresses inavouées des gens de peu. C’est pittoresque et poignant à la fois, comme un air aigrelet d’accordéon qui prend mystérieusement aux tripes. Précocement disparu en 1936, en Russie, où il accompagnait André Gide, Dabit n’a jamais su que son Hôtel du Nord, devenu un triomphe de cinéma, est entré dans la culture populaire.

L’Hôtel du Nord d’Eugène Dabit et Christian Cailleaux (Finitude)