
Qu’il édifie des totems pop et bigarrés, élabore un « rituel motomachique » dans un parking souterrain sur fond de clavecin (Radio Vinci Park), conçoive un champ de carrosseries dressées à la verticale (« Bad Timing ») ou fasse ériger en sable des vestiges de civilisation (« Outremonde »), Théo Mercier scinde son travail entre sculptures et scènes, objets inertes et corps en mouvement, temps géologique et éphéméride du présent. Avec Skinless, présenté l’an dernier au festival d’Automne, il signait une fable écolo queer pour deux danseurs en costumes d’écorchés, sur une scène jonchée de détritus.
Réfractaire au système marchand et au culte de l’artiste démiurge, c’est avec Goodworld Studio, sa propre structure associative, qu’il produit désormais ses œuvres, valorisant l’éthique du « faire ensemble ». Avec ce nouveau solo show, l’artiste est allé débusquer chez des antiquaires toutes sortes de sculptures similimédiévales, de statuettes funéraires et de masques rituels provenant des quatre coins du globe. Sur ces bustes impassibles qui scrutent le visiteur, éclairés par des panneaux de LED, sont agglutinés une myriade d’escargots hyperréalistes qui se propagent dans l’espace de la galerie.

Bestioles immémoriales, symboles de fertilité, les gastéropodes ont des attributs qui forcent l’admiration : hermaphrodites sécrétant du mucus, mais aussi dotés d’une coquille de nacre, d’antennes rétractiles, d’un bulbe olfactif et d’une langue dentée. En les associant à ces visages antiques, Mercier détourne les codes de la muséographie tout en brouillant les frontières entre le vivant et le figé. Une façon de reconsidérer l’histoire et de revisiter la Vanité à l’aune du capitalocène : l’escargot, symbole d’une slow life qui a traversé les âges, absorbe les larmes du passé pour mieux régénérer le présent.
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