La bande-annonce fantasque d'« Orlando, ma biographie politique » de Paul B. Preciado

Vous le connaissez philosophe et écrivain. Paru en 2000, son Manifeste contra-sexuel jetait les bases d'une pensée inclusive, militant pour une révolution du désir et du genre à une époque où la fluidité de l'identité n'appartenait pas au débat public, avant que son autofiction politique Testo Junkie : sexe, drogue et biopolitique (2008) ne devienne un texte essentiel pour les théories queer. Le philosophe espagnol est désormais cinéaste : son premier film, une adaptation libre d'Orlando de Virginia Woolf (1928), sera présenté dans la section Encounters de la prochaine Berlinale.

Sous-titré Ma biographie politique, le film s'annonce, d'après son premier trailer énigmatique, comme un conte coloré et érogène, créant des ponts entre l'époque médiévale et la nôtre, pour mieux souligner la contemporanéité de l'oeuvre de Virginia Woolf. Rappelons que ce roman déroutant, hybride, se présente comme une biographie fictive d'Orlando, jeune aristocrate anglais et androgyne qui vit à la cour de la reine Elisabeth Ire, et refuse de se marier. Devenu ambassadeur à Constantinople, il se réveille un matin dans la peau d'une femme. Un changement de sexe que Virginia Woolf traitait comme une métamorphose merveilleuse, naturelle, jamais problématique, pour repenser les rapports de force entre genres d'une société patriarcale.

L'idée du film est née lorsque Arte contacte Paul B. Preciado en 2020 pour lui proposer le tournage d’un film sur sa vie. Plutôt qu'une plate autobiographie, l'écrivain, qui a déclaré être « une femme, une lesbienne, un homosexuel, un homme trans… tout cela et rien de tout cela à la fois » dans une interview donnée au Monde en 2021, choisit alors de se raconter à travers l'histoire d'un autre, cet homme devenu femme qui navigue joyeusement entre les genres et les époques.

Entre costumes médiévaux, perruques kitsch, maquillages outranciers, anachronismes temporels et homoérotisme, la bande-annonce du film s'inscrit clairement dans une esthétique camp, qui raille avec ironie les conventions de la culture virile dominante. On a hâte de découvrir ce film qui semble faire de l'œil au cinéma trash et poétique de John Waters.