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Para One, Vincente Minnelli, Kieslowski : ils sont dans le nouvel épisode de mk2 Curiosity

  • Trois Couleurs
  • 2021-10-21

Cette semaine, on sonde un système politique défaillant en Pologne avec Kieslowski, on accueille l’arrivée bouleversante d’un heureux événement chez Vincente Minnelli, et on se laisse envoûter par un court-métrage du musicien Para One.

Allons donc, papa ! de Vincente Minnelli (1951, 82', Etats-Unis)

On le connaît comme le père de la comédie musicale moderne - dans Un Américain à Paris et Tous en scène, il intégrait avec fluidité les numéros chantés-, s’émancipant du modèle plus artificiel du music-hall. Mais sous ses atours de chorégraphe et magicien du technicolor qui en fit le petit chouchou des studios de l'âge d'or hollywoodien, Vincente Minnelli n’avait rien d'un naïf. Preuve en est avec cette comédie espiègle, qui questionne l’air de rien les fissures du modèle familial et ses injonctions.

Allons donc, papa est le second volet d’un diptyque comique (après Le père de la mariée, 1950) sur une famille américaine dont on découvre les petites épopées sentimentales. Alors que sa fille (Elizabeth Taylor) vient de se marier, Stanley (Spencer Tracy) panique en apprenant qu’il va être grand-père (cauchemars à gogo), tandis que sa femme (Joan Bennett) redouble de mondanités surfaites. Résultat : le couple de futurs parents périclite, les rivalités entre familles explosent.

Evocation d’une filiation compliquée, régie par des attentes sociales absurdes, guerre des sexes, angoisse de la vieillesse et préoccupation des apparences… Vincente Minnelli détourne la pesanteur de ces thèmes par un sens soutenu du rythme et un goût pour l'absurde - comme lors de cette séquence de disparition d'un landau dans un parc, où la maladresse d'un grand-père en prise avec la maternité de sa fille flirte avec la loufoquerie d'une screw ball comedy.

En faisant planer l’ombre d'une séparation à l’aube d’une naissance, Vincente Minnelli esquisse une satire de la middle class américaine, discrètement logée sous les codes de la comédie romantique. Il ne faut pas oublier qu'à l'époque, Hollywood prône la famille comme une sacro-sainte valeur, idéologie qui empêche Minnelli de véritablement aller au bout de sa critique de l’american way of life, en l’enrobant d’un certain sentimentalisme. Reste la sophistication des dialogues, l’élégance d’une mise en scène riche en retournements, et un humour délicieusement désinvolte, que ne renieraient pas Ernst Lubitsch et Billy Wilder. Léa André-Sarreau

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Sans fin de Krzysztof Kieślowski (1985, 109', Pologne)

Avant Le Décalogue (1988), Krzysztof Kieślowski signait une œuvre plus confidentielle, censurée pendant de longues années par le gouvernement polonais du fait de son sous-texte politique virulent. Antek, avocat de profession, vient de décéder. Alors qu’il laisse derrière lui sa famille et ses clients, il persiste pourtant à hanter les lieux de sa présence. Sa femme, Ursula, qui prend progressivement conscience de son incapacité à vivre sans amour, est contactée par l’épouse d’un ancien client accusé de mener des actions au sein du Solidarność, syndicat alors interdit en Pologne.

Plus qu’une charge contre un système politique défaillant, Sans fin est avant tout le portrait d’une femme (déchirante Grażyna Szapołowska) submergée par le désespoir, qui, incapable de faire le deuil de son époux, tente vainement d’exorciser son mal-être dans l’adultère et l’hypnose. A travers les yeux d’Antek et la douleur d’Ursula, Kieślowski fait l’état des lieux glaçant d’un pays dévasté et impuissant, sur lequel plane sans cesse le spectre oppressant de la mort. Sarah Jeanjeau

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Entretiens avec Irène Jacob, Julie Delpy et Marin Karmitz à propos de Krzysztof Kieślowski (2021, 25’, France)

"Je crois qu’il racontait que, enfant, il a beaucoup suivi son père tuberculeux de sanatorium en sanatorium. Il était solitaire, il lisait beaucoup et j’ai l’impression qu’il a eu une grande propension au questionnement" nous a raconté Irène Jacob, actrice de La Double Vie de Véronique (1991) et de Trois couleurs. Rouge (1994) à propos de Krzysztof Kieślowski. Pour mieux saisir le cinéaste polonais, qui cultivait à travers ses films à la fois cruels et humanistes l'art de l'ambiguïté et du trouble, on vous propose aujourd'hui de découvrir une série d'entretiens avec ses proches collaborateurs.

Au détour de ces conversations, on apprend de la bouche de l'actrice Julie Delpy que Kieślowski était doté d'un humour noir ravageur, tout en étant très convivial, ou encore que Marin Karmitz, grand admirateur du Décalogue, a été enthousiasmé à l’idée de continuer ce principe sériel avec Bleu, Blanc et Rouge, qu'il a produit.

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Krzysztof Kieślowski vu par Julie Delpy

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Krzysztof Kieślowski vu par Irène Jacob

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It Was On Earth That I Knew Joy de Para One (2009, 35’, France)

En 2090, deux machines dialoguent pour tenter de trouver les origines de l’humanité, disparue quatre-vingts ans plus tôt suite à une pandémie. Réalisée il y a dix ans, It Was On Earth That I Knew Joy est une uchronie qui résonne de façon troublante aujourd’hui, en temps de Covid. Dans un anglais (langue de la technologie par excellence) hâché, deux appareils dialoguent et sondent, incrédules, ce qui leur est radicalement étranger (l’amour, la mémoire, les émotions).

Sur l'écran surgissent alors des images, éclats de souvenirs directement tirés du flot de la conscience d'un homme qui commente ce qu'il vit en voix off. Il raconte les disparitions successives de son chien, son père, sa compagne, puis la sienne, sur des images de réminiscence éparse, heureuse puis angoissée, de balade crépusculaire ou de baignade solaire. Essai métaphysique, It Was On Earth questionne l’essence de l’humanité autant qu’il collecte selon la formule de Chris Marker—professeur du cinéaste avec lequel il entretint une longue correspondance – les « choses qui font battre le cœur ». Raphaëlle Pireyre

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Para One : « Je viens de la musique électronique, qui clairement entretient un rapport à la transe »

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