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Jacques Rozier s’est éteint à l'âge 96 ans

  • Hugues Porquier
  • 2023-06-05

Auteur d'un cinéma libre, impétueux, le cinéaste, dernière grande figure de la Nouvelle Vague, est mort dans la nuit du 1er au 2 juin, tout près de la mer.

Le réalisateur d'Adieu Philippine est mort à l'âge de 96 ans, « dans sa maison de Théoule-sur-Mer, au flanc de l'Estérel, bercée par la mer », a annoncé sur Facebook sa collaboratrice Michèle Berson, confirmant une information du Monde. Jusqu'au bout, ce cinéaste de la marge, amoureux des virées en mer, aura navigué seul parmi les cinéastes de la Nouvelle Vague, tout en étant reconnu par ses pairs - en 2019, à la mort d'Agnès Varda, Godard, disparu en septembre 2022, dira d'ailleurs de lui : « Quand Agnès Varda est morte, j'ai pensé : la vraie Nouvelle Vague, on n'est plus que deux. Moi et […] Jacques Rozier [...]. »

Né en 1926 à Paris, Jacques Rozier a suivi des études de cinéma à l'IDHEC - à cette époque, il fait un stage sur le tournage de French Cancan de Jean Renoir. Il se fait ensuite embaucher comme assistant à la télévision - une machine très calibrée qui fascine alors Rozier. En 1958, il rencontre Jean-Luc Godard, en présentant son court Blue Jeans aux Journées internationales du court métrage, à Tours. Godard, qui est alors critique au magazine Arts, signe alors un article intitulé « Resnais, Varda, Demy et Rozier dominent le Festival de Tours ». Pour lui, Blue Jeans est « le film le plus frais, enfantinement pur, jeune et sympa de ces fades et horriblement sérieuses journées. »

C'est par son entremise que Rozier rencontre Georges de Beauregard (producteur d’À bout de souffle, Le Mépris ou encore Lola). Cette rencontre donne naissance au premier long métrage de Jacques Rozier, Adieu Philippine (1962), portrait à la fois doux et amer de la jeunesse française, en pleine guerre d'Algérie - le film sortira un an plus tard, en 1963, une fois la guerre finie. Un mauvais timing qui symbolise bien le fait que, bien malgré lui, le cinéaste aura toujours été à contre-courant, à contre-temps.

D'AVENTURES EN AVENTURES

Très compacte, l'œuvre de Jacques Rozier se limite en tout et pour tout à cinq longs métrages (Adieu Philippine (1962) ; Du côté d'Orouët (1973) ; Les naufragés de l’île de la Tortue (1974) ; Maine Océan (1986) ; Fifi Martingale (1997)), d'où émanent une grande fraîcheur, et plusieurs courts (notamment Rentrée des classes en 1956, Dans le vent en 1962, ou Paparazzi en 1964, qui suit Brigitte Bardot pendant le tournage du Mépris).

Après Adieu Philippine, sorti en 1962, ce n'est qu'en 1969 que Rozier parvient à tourner Du côté d'Orouët, qui ne sera distribué en France qu'en 1973. Un film léger, badin, avec un Bernard Ménez maladroit et tendre, distrait et dragueur, et trois amies (Françoise Grégan, Danielle Croisy, Caroline Cartier) cherchant à s'amuser sur la côte vendéenne.

Creusant son sillon singulier, le cinéaste-aventurier réalise en 1974 l'étonnant Les Naufragés de l'Île de la Tortue, avec Pierre Richard et Jacques Villeret en têtes d'affiche. L'histoire absurde, et tout en flottements, de deux agents de voyage qui dérivent en direction d'une île déserte. Il retourne en 1986 à quelque chose de plus terre-à-terre avec Maine Ocean (1986), mais avec encore un parti pris audacieux : filmer un voyage en train en temps réel.

Explorateur inépuisable - le tournage d'Adieu Philippine s'est en partie déroulé en Corse, dans des montagnes seulement accessibles à dos de mule -, Rozier avait déclaré ceci dans l'émission Cinéma, cinémas, en 1986 : « Si je n’étais pas cinéaste ? J’aurais été marin. Marin comme les marins de Pagnol, pour traverser le Vieux-Port.» On aurait bien aimé l'accompagner dans ses escapades.

On se console en se rappelant qu'en août dernier, mk2 films annonçait le rachat de la quasi-intégralité de son œuvre, restaurée et numérisée par la Cinémathèque française, avec le soutien du CNC, en collaboration avec l’Institut Audiovisuel de Monaco et la Cinémathèque suisse. Il rejoindra dans le catalogue mk2 d’autres grands noms du cinéma français, Jacques Demy, Agnès Varda, François Truffaut, Claude Chabrol, Robert Bresson, Alain Resnais et Jacques Rivette.

mk2 films acquiert des films de Jacques Rozier

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La liste des films de Jacques Rozier inclus dans le catalogue repris par mk2 films :

Longs-métrages

Adieu Philippine (1962)

Les naufragés de l’île de la Tortue (1974)

Maine Océan (1986)

Fifi Martingale (1997)

Courts-métrages

Rentrée des classes (1956)

Blue Jeans (1957)

Dans le vent (1962)

Paparazzi (1964)

Le parti des choses (1964)

Roméos et Jupettes (1966)

Nono Nenesse (1973), co-réalisé avec Pascal Thomas

Lettre de la Sierra Morena (1983)

Revenez plaisirs exilés ! (2012)

Série

Joséphine en tournée (1990) – 4 épisodes de 50’

Image (c) mk2 Films

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