- I.A. QUOI ?
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I.A. QUOI ? ⸱ Redécouvrir le monde
- Julien Dupuy
- 2024-05-31
L’édito de Julien Dupuy. Le cinéma a toujours cherché à dupliquer la perception de l’œil humain, que ce soit en introduisant la couleur, en augmentant la fréquence d’images ou encore en lançant les formats larges, qui s’approchent de ce que recouvre notre champ de vision. Plus récemment, la Haute Dynamique tente de reproduire notre acuité visuelle, notamment dans la gestion des hautes et basses lumières. Mais les I.A. pourraient-elles nous permettre d’aller au-delà de nos capacités biologiques ?
L’œil humain est conditionné par notre nature de chasseur cueilleur. Nous sommes par conséquent des animaux trichromates, autrement dit notre œil décode le monde à travers trois couleurs. C’est pour cette raison que la matrice de Bayer, au cœur des capteurs des caméras numériques, est composée de trois filtres : rouge, bleu et vert. Cette dernière couleur est même présente deux fois plus que les autres, puisque l’humain est beaucoup plus sensible à cette teinte.
Cependant, une large portion de notre environnement nous échappe. Notre vision se réduit drastiquement de nuit, contrairement aux félins par exemple. De la même façon, aucun humain ne peut voir les ultra-violets, alors que certains insectes ne doivent leur survie qu’à leur capacité à percevoir ces ondes lumineuses. Or, l’I.A. pourrait nous ouvrir cette nouvelle vision du monde.
Il est, à ce titre, éloquent d’étudier en quoi ces technologies sont déjà capables de compenser certains handicaps, notamment le daltonisme qui frappe environ 10% de la population. Le Professeur Parham Aarabi a ainsi mené une expérience, avec des utilisateurs I.A., pour étudier comment différentes sortes de daltoniens réagissaient aux couleurs et comment réadapter la colorimétrie du site internet en fonction de chaque spécificité oculaire. À plus ou moins long terme, il sera donc possible d’adapter chaque écran à son utilisateur, ou encore que des lunettes à réalité augmentée appliquent des filtres calculés en temps réel pour compenser les déficiences visuelles.
Si ces innovations ont déjà fait l’objet d’expérimentations, on peut tout aussi bien imaginer que ces mêmes technologies puissent augmenter les capacités humaines. Le cinéma a déjà montré son désir de nous montrer ce que notre physiologie nous empêche de voir. Ainsi, certains films documentaires, comme Microcosmos – le peuple de l’herbe, cherchent à nous faire adopter le regard d’insectes en employant des lentilles macroscopiques et des caméras pilotées par ordinateur. De la même façon, nous pourrions, à l’avenir, percevoir notre monde et créer des œuvres en portant un nouveau regard sur notre environnement, comme celui d’un insecte ou d’un animal nyctalope. Il sera intéressant, dès lors, de voir en quoi cette nouveau perception pourrait impacter les créateurs d’images.
EN + L’ingénieur Daniel Bulli imagine comment les I.A. pourraient, dans un proche avenir, l’aider à compenser son daltonisme. Lire l’article.
EN + Un reportage sur l’humoriste aveugle Brian Fischler qui, avec une application dopée aux I.A., acquiert une toute nouvelle perception de son environnement.
I.A. PLAYLIST
Une pétition pour protéger les doubleurs de l’émergence des I.A. a été mise en ligne et rencontre déjà un succès impressionnant. Ils apportent ainsi la preuve flagrante de l’attachement du public à ces comédiens dont l’industrie du cinéma aurait grand tort de se passer. La pétition.
Le court-métrage Air Head, un des premiers exemples de l’utilisation du générateur de vidéo Sora, serait partiellement une supercherie ! C’est ce que révèle cet excellent article du non moins excellent blog et podcast FXGuide.
Une intervention passionnante du romancier Alain Damasio à propos de sa récente enquête sur et avec les chercheurs de la Silicon Valley et sur les I.A.
La société d’art graphique Nakatomi offre ce crayon de papier, décoré d’un slogan radical : « This machine kills A.I. » (Cette machine tue les I.A.).
Image : Microcosmos – le peuple de l’herbe