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CANNES 2023 · « Les Herbes sèches » de Nuri Bilge Ceylan : au coeur de l'hiver

  • Corentin Lê
  • 2023-05-20

En Anatolie, un professeur est accusé d’harcèlement sexuel, puis fait la rencontre d’une enseignante qu’il va chercher à séduire. En compétition, Nuri Bilge Ceylan signe un drame existentiel surprenant, croisant avec souplesse grande fresque romanesque et cinéma moderne.

L'actrice Merve Dizdar a obtenu le Prix d'interprétation féminine pour son rôle dans le film au Festival de Cannes 2023.

S’il rêve de travailler un jour à Istanbul, loin de la campagne, Samet enseigne les arts plastiques dans un petit collège d’Anatolie. Antipathique au possible, il est accusé avec Kenan, son collègue et colocataire, de mettre par son comportement mal à l’aise l’une de ses élèves, Sevim. Borné et persuadé d’être victime d’une accusation exagérée, Samet fait en parallèle la rencontre de l’insaisissable Nuray, professeure d’anglais et ancienne militante qui a perdu sa jambe lors d’un attentat politique… Proche d’un roman fleuve, l’intrigue des Herbes sèches s’inscrit ainsi dans la lignée des précédents films de Nuri Bilge Ceylan, lauréat de la Palme d’or en 2014 avec Winter Sleep. Le film se rapproche pourtant davantage de son précédent long-métrage, le très beau Poirier sauvage (2018), avec lequel il partage un même lâcher-prise dans sa manière de trouer l’avancée du récit par des dérèglements inattendus.

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C’est qu’au-delà des dialogues touffus à forte tendance philosophique, qui caractérisent toujours le cinéma très bavard de Ceylan, se déploie ici une série d’écarts formels témoignant d’un relâchement salutaire de la part d’un cinéaste à l’inverse plutôt célébré pour ses drames froids et pesants. Un vent de légèreté souffle ainsi sur l’épaisse couche de neige qui recouvre l’Anatolie des Herbes sèches : à plusieurs reprises, des changements d’axe lors d’une longue conversation ou un rapide mouvement de caméra après un enchaînement de plans fixes suffisent pour nous bouleverser, en miroir d’un personnage dont les certitudes sont de plus en plus ébranlées au fur et à mesure de l’intrigue. La rigidité et la rigueur dont fait preuve la mise en scène de Ceylan ont en ce sens pour effet d’étirer les situations jusqu’au point de rupture : le film a beau placer en surface un ensemble de repères (des lieux qui reviennent, des personnages qui prennent leur temps pour parler, un rythme assez lent), il avance au contraire masqué pour s’avérer, dans sa deuxième moitié, superbement imprévisible. Au point d’en devenir véritablement troublant et ambigu, et de commencer à nous hanter dès son générique de fin.

Le Festival de Cannes se tiendra cette année du 16 au 27 mai 2023. Tous nos articles sur l’événement sont à suivre ici.

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