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FAN ZONE · Alexis Diop : « Comment ne pas penser aux confinements successifs en revoyant 'Jeanne Dielman' ? »

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  • 2023-04-20

FAN ZONE, c'est notre nouvelle rubrique qui interroge les artistes sur la façon dont un film qui revient sur le devant de la scène dans l'actualité a marqué leur imaginaire et leur travail. Pour lancer les festivités, le cinéaste Alexis Diop (« Avant Tim », court métrage sacré en 2020 Grand prix Contrebandes au FIFIB), nous parle de la radicalité et des résonances contemporaines de Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles de Chantal Akerman, à revoir en salles en ce moment.

Comment avez-vous découvert le film ?

J'ai découvert Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles dans le cadre universitaire. Le dernier chapitre de mon mémoire de Master était consacré au plan-séquence fixe comme forme héritée de la surveillance. Assez logiquement, ce travail de recherche m’a mené au film phare de Chantal Akerman.

Quelles sensations vous a-t-il procuré ?

Je me souviens d’un état de semi-conscience, quasi d’hypnose. D’une expérience de cinéma captivante dans tous les sens du terme : j’étais à la fois fasciné par le film et prisonnier de son dispositif. Ce que je retiens aujourd’hui de Jeanne Dielman, c’est la radicalité du geste : la puissance obsessionnelle de sa mise en scène, la dimension performative de ses plans-séquences et son rapport au temps décomplexé. Le cinéma de Chantal Akerman a durablement marqué ma pratique - à tel point que je cite assez explicitement l’une de scènes de Jeanne Dielman dans mon dernier film, Avant Tim (avec Françoise Lebrun, ci-dessous).

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Quel nouveau sens lui trouvez-vous aujourd’hui ? De quels bouleversements politiques, sociaux se fait il l’écho ?

Jeanne Dielman dépeint sans conteste le portrait d’une femme broyée par l’ordre patriarcal. Bien que le mari de Jeanne soit décédé, l’institution du mariage continue de vivre en elle. Elle dicte sa mécanique quotidienne de plan en plan et est inscrite dans chacun de ses gestes. Jeanne ne s’exécute que pour le plaisir des hommes qui l’entourent, jamais pour le sien. En épuisant son rituel domestique, brisé par la scène finale, Chantal Akerman le visibilise et le questionne, et c’est en cela que Jeanne Dielman est un grand film féministe.

Par ailleurs, comment ne pas penser aux confinements successifs que nous avons connus ces dernières années en revoyant Jeanne Dielman ? L’ère Covid a profondément reconfiguré notre rapport à l’ennui et à l’espace domestique et le cinéma de Chantal Akerman interroge mieux qu’aucun autre ces questions - la solitude, le poids écrasant de la routine, l’aliénation au foyer… Il me semble donc criant d’actualité aujourd’hui.

Françoise Lebrun dans Avant Tim © Les Films de l’Ermitage - 2020

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