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« Inchallah un fils » de Amjad El Rasheed : la Jordanie au féminin
- Damien Leblanc
- 2023-05-27
Premier film jordanien jamais présenté à Cannes, ce drame signé Amjad El Rasheed (lauréat cette année du Prix de la Fondation Gan à la Semaine de la Critique) raconte avec limpidité et inspiration le combat d’une mère luttant pour ses droits après le décès de son mari.
Situé de nos jours dans un quartier modeste d’Amman, capitale de la Jordanie, Inchallah un fils s’intéresse au destin de Nawal (Mouna Hawa), mère trentenaire dont l’époux vient de décéder. Le problème étant que les lois concernant l’héritage, très défavorables aux femmes, auraient avantagé Nawal si elle avait eu un fils mais il se trouve qu’elle a une fille. De fait, les biens du couple se doivent d’être répartis entre les plus proches parents du défunt sans que l’épouse n’ait son mot à dire… à moins que lesdits proches (ici les frères du mari décédé) ne renoncent à leur part et acceptent que Nawal garde sa maison. Cette dépendance de l’héroïne à des décisions extérieures à elles offre au film une tension dramatique forte, surtout que l’entourage masculin se montre d’abord conciliant avec elle avant des revirements qui la mettent en grave danger financier.
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Lire la critiqueRacontant qu’il a grandi entouré de femmes, Amjad El Rasheed (cinéaste né en 1985, qui signe là son premier long métrage) brocarde le schéma oppressif qui attend des veuves jordaniennes qu’elles subissent sans broncher les abus d’un patriarcat qui bafoue leurs droits. Pour cela, il a la bonne idée de mettre en exergue l’absurdité de ce postulat en se moquant par petites touches du ridicule et de l’injustice extrêmes de la situation. Par une mise en scène sobre, limpide et posée, le réalisateur semble ainsi refuser de céder au sensationnalisme et au misérabilisme à tout prix, préférant donner un poids plus souverain et déterminé à cette héroïne qui lutte jusqu’au bout pour ses droits. Grâce à ce rythme finalement plus posé qu’agité, Inchallah un fils trouve alors à travers les armes de la grammaire cinématographique tout son pouvoir à une femme indignée qui réussit au final à accorder miraculeusement le monde à ses désirs.
Le Festival de Cannes se tiendra cette année du 16 au 27 mai 2023. Tous nos articles sur l’événement sont à suivre ici.
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