On a testé le cinéma à 8h : « C’est un lieu de rencontre. Je viens en soutien ce matin »

Suite à l’annonce du couvre-feu, les cinémas mk2 (société éditrice de TroisCouleurs) ont décidé d’ouvrir leurs portes dès 8h. On était sur le pont ce mercredi matin, à la rencontre de spectateurs cinéphiles qui se sont extirpés de leurs lits pour voir Drunk, de Thomas Vinterberg, film sur une bande de profs portés sur la bouteille. Retour (sobre) sur cette expérience réjouissante. 

7h30 : La nuit est encore dense, le halo des néons du mk2 Quai de Seine divague sur le bassin de la Villette. Dans cette atmosphère, inédite, l’esprit encore embrumé, on tombe sur une première spectatrice bien plus alerte que nous. Le bonnet vissé sur la tête, elle fait le pied de grue devant l’entrée du cinéma.

Chantal, retraitée, nous explique qu’elle vient régulièrement au mk2 Quai de Seine, mais que ce matin, c’est un peu particulier. « Là, tout bêtement, j’ai eu une nuit d’insomnie. J’ai eu la bonne surprise de voir qu’à 8 heures il y avait des films. » Elle ajoute :  « J’ai voulu voir Drunk parce que Festen, du même réalisateur, m’avait bien plu. Je pense que je vais passer un bon moment. » Elle nous salue, s’éloigne un instant, puis revient, visiblement concernée, nous parler de l’importance de la salle de cinéma : « C’est un lieu de rencontre. Je viens en soutien ce matin. »

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Quand Chantal parle de « soutien », elle évoque la situation difficile que traverse le secteur du cinéma depuis l’annonce du couvre-feu faite par le gouvernement le 14 octobre dernier. Les exploitants, obligés de fermer leurs portes à 21h, ont dû annuler les dernières séances du soir.

DÉCALAGE HORAIRE

Appelant à la mise en place d’un assouplissement des règles du couvre-feu, qui proposait que les séances et représentations du soir soient maintenues, le ticket de cinéma ou de théâtre servant de justificatif en cas de contrôle policier, la ministre de la Culture Roselyne Bachelot, la maire de Paris Anne Hidalgo et la Fédération nationale des cinémas français ont dû faire face à la décision intangible de Jean Castex, qui s’est exprimé vendredi dernier. Le Premier ministre a tranché : il n’y aura pas de dérogation possible : « les règles doivent être les mêmes pour tous.»

Le cinéma doit être sauvé. C’est le message transmis par la majorité des spectateurs rencontrés ce mercredi matin. mk2 annonce qu’ils ont été plus de 350 à répondre présent pour cette première séance matinale, toutes salles mk2 confondues.

Ce nouvel horaire semble amener un nouveau public : des jeunes actifs, largement représentés ce mercredi matin. Par exemple Julie, qui nous explique qu’elle s’est décidée à venir avant le boulot, elle aussi par solidarité. « J’avoue que j’ai aussi entendu parler des viennoiseries offertes« , glisse-t-elle dans un sourire malicieux. En effet, ce mercredi matin, mk2 offre une surprise gourmande aux spectateurs lève-tôt : des viennoiseries du pâtissier Cédric Grolet, élu meilleur pâtissier du monde.

JOYEUSE GUEULE DE BOIS

Le pain au chocolat terminé, il faut entrer dans la salle, avec la vingtaine de spectateurs présents. Le film commence. L’expérience est intense : on commence avec une scène d’ouverture qui prend la forme d’une beuverie trash entre ados dans un parc  -on rappelle qu’on n’en est en principe qu’au petit-déjeuner.  « Ohhh, c’est pas vrai! » souffle une spectatrice secouée.

Le soleil qui nous attend à la sortie de la salle nous rappelle que le temps a passé. Dehors, un spectateur termine sa viennoiserie, assis : »Ça s’est super bien passé ! Je reviendrai peut-être pas tous les jours, mais ça lance bien la journée« , dit-il d’un air enchanté. Le petit-déjeuner cinéphile, nouveau rendez-vous festif ?

Image : © mk2

Par Cameron Guyot