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« Par coeurs » de Benoît Jacquot : les mystères du jeu
- Quentin Grosset
- 2022-12-08
Benoît Jacquot nous fait pénétrer l’intimité d’Isabelle Huppert et de Fabrice Luchini lors de leurs répétitions, à l’été 2021, pour deux spectacles différents au Festival d’Avignon. Un documentaire précieux sur leur méthode de travail, qui saisit en montrant leurs fragilités.
Ce sont deux acteurs qu’on a l’habitude de voir briller d’intensité. Aussi, le fait de les regarder dans des temps de latence, dans leurs tâtonnements, leurs doutes, offre une perspective à la fois inédite et spectaculaire. Devant le dispositif (deux caméras surmontées d’un micro, de la légèreté pour plus d’abandon) imaginé par Benoît Jacquot et la chef-opératrice Caroline Champetier, Isabelle Huppert et Fabrice Luchini se confient comme jamais sur leur technique, leurs blocages, le trac aussi. Huppert s’apprête à jouer La Cerisaie de Tchekhov dans la cour d’honneur du Palais des papes, dans une mise en scène de Tiago Rodrigues, et on la voit sollicitée de toutes parts, pour son costume, son maquillage.
Benoît Jacquot, l’homme qui aimait les femmes
Lire l'articleToujours en mouvement dans les coulisses, elle se répète son texte à haute voix et bute sur une réplique. Luchini, lui, est plus statique, sur une petite scène : on le voit assis, apportant les dernières retouches et variations à son seul-en-scène, une lecture de Nietzsche. L’acteur cite Louis Jouvet parlant du fait de jouer : « Cette pratique de sorcellerie qui va éteindre ton moi personnel. » Et c’est bien cette rencontre un peu magique entre un texte et un comédien qu’explore Jacquot avec Par cœurs. La beauté du film réside en ce que, à la fin, cet acte quasi sorcier qu’est le jeu reste toujours aussi mystérieux.
Par cœurs de Benoît Jacquot, Les Films du Losange (1 h 16), sortie 28 décembre
Image (c) Les Films du Losange