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The Young Lady, À voix haute… Les films préférés de la rédac cette semaine

  • Trois Couleurs
  • 2017-04-12

THE YOUNG LADY

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Dans l’Angleterre rurale du xixe siècle, la jeune Katherine, mariée de force à un lord plus âgé qui la délaisse, ne supporte pas d’être enfermée dans sa demeure. Elle se révolte au fil d’un récit magistral, faux huis clos à la tension bien réelle. D’abord, la déconvenue: le soir de sa nuit de noces, Katherine (Florence Pugh, révélation convaincante dans tous les registres) découvre qu’Alexander, homme d’humeur maussade qui la regarde à peine, ne la touchera même pas. Puis vient l’ennui, avec pour horizon inaccessible les vastes étendues de la campagne anglaise, réduites à une fenêtre close. Le premier signe d’abandon survient dans un plan fixe montrant la jeune femme allongée sur le canapé du salon, couverte d’une longue robe bleue, mais les pieds nus. C’est seulement après le départ prolongé du maître de maison que le film bascule, la mariée découvrant la passion auprès d’un palefrenier entreprenant. Très vite, les barrières sociales se craquellent: le domestique dort dans le lit du mari, porte ses habits ; Katherine, frondeuse, déjeune en robe de chambre, tout sourire devant la servante qui les sert froidement. Dans la course à son bonheur précaire, l’héroïne se mue alors en stratège diabolique. Au sein d’un décor cloisonné où s’imprime une solitude immense, le Britannique William Oldroyd nimbe d’une noirceur non dépourvue d’humour le genre très balisé du film d’époque victorienne. Un premier long métrage aussi maîtrisé qu’ébouriffant. Olivier Marlas. 

JE DANSERAI SI JE VEUX

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Dans la ville israélienne branchée de Tel-Aviv, trois jeunes Palestiniennes partagent un appartement… et un même combat contre le patriarcat. La première scène donne le ton: dans un club, des filles et des garçons trinquent, fument, se déhanchent, bravent tous les interdits de la société palestinienne traditionnelle dont ils sont issus. Le film relate ensuite les parcours de Laila, avocate qui refuse toute forme de conformisme, Nour, étudiante pieuse fiancée à un homme violent, et Salma, DJ qui cache son homosexualité à sa famille. Ce premier long métrage de Maysaloun Hamoud, Palestinienne de 35 ans, est produit par Shlomi Elkabetz, qui coréalisa avec sa regrettée sœur, Ronit, Le Procès de Viviane Amsalem. Comme ce dernier, Je danserai si je veux est centré sur des femmes en quête de liberté. Mais là où les Elkabetz revendiquaient une forme de théâtralité, Hamoud lorgne du côté de la série, avec sa manière d’entrecroiser les histoires respectives de ses héroïnes dans une mise en scène très rythmée. Coloré et musical, Je danserai si je veux évite de sombrer dans le catalogue sociologique grâce à l’énergie de ses actrices et à la vigueur de son propos. Julian Dokhan. 

À VOIX HAUTE. LA FORCE DE LA PAROLE

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Filman la préparation à un concours d’éloquence d’étudiants de Seine-Saint-Denis, Stéphane de Freitas (fondateur de l’épreuve) et Ladj Ly (ancien membre du collectif Kourtrajmé) nous plongent dans l’effervescence des idées et la fournaise du langage. Jamais montrée comme un savoir-faire mécanique, la rhétorique est ici un outil de dépassement pour des jeunes ancrés dans un quotidien pas toujours reluisant. Pour convaincre, le théâtre et le slam sont autant valorisés que les plaidoiries classiques enseignées par de grands avocats parisiens. Grâce à une mise en scène organique dans laquelle l’énergie des scènes de groupes répond parfaitement aux moments plus intimes qui laissent poindre les aspirations (Layla souhaite repenser le féminisme) et les doutes (Eddy a-t-il le niveau pour être acteur?), cette odyssée fait l’effet d’un argument magnétique. Au milieu de ce tourbillon de rimes, de jeux de mots, de sourires et d’aisance, les réalisateurs semblent penser que le pouvoir de la parole est une arme suffisante pour enjamber toutes les barrières sociales. Une perspective incertaine mais enchanteresse. Olivier Marlas. 

PARIS EST UNE FÊTE

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On l’avait perçu avec ses précédents documentaires très engagés sur la situation des migrants de Calais (Qu’ils reposent en révolte en 2011, Les Éclats en 2012) ou sur le « mouvement des indignés » en Espagne (Vers Madrid. The Burning Bright en 2014) : pour le cinéaste Sylvain George, les luttes politiques sont indissociables de l’affirmation d’une esthétique radicale. Son dernier documentaire, qui suit et entrelace différentes vagues d’insurrection ayant éclaté à Paris et dans sa banlieue en 2015 et 2016 (contre la loi El Khomri, contre la violence subie par les réfugiés, contre l’état d’urgence…), ne change pas de parti pris. Toujours dans un montage fragmentaire et un noir et blanc tranchant, Paris est une fête interroge brillamment (sans commentaire, c’est au spectateur de faire des liens) ce que ces foyers de révolte disparates ont en partage: l’envie d’inventer de nouvelles façons de vivre, de résister à un État de plus en plus sécuritaire, de se réapproprier l’espace public. Un film lucide mais loin d’être désenchanté, parce que, tout simplement, il nous remobilise. Quentin Grosset.

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