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« Les Galettes de Pont-Aven » en une scène culte

  • Michaël Patin
  • 2019-03-08

Resté dans les mémoires pour son audace érotique, le film de Joël Séria étonne encore aujourd’hui par son anticonformisme. Retour, en une scène emblématique, sur ce petit ovni du cinéma français.

«  Tout ce qu’il peut y avoir de déclenchement artistique chez l’homme ne peut venir que de la femme », affirme Jean-Pierre Marielle dans le documentaire proposé en bonus des Galettes de Pont-Aven, dans un nouveau coffret dédié à l’acteur. Henri Serin, son personnage de VRP et peintre amateur, approuverait, tout comme Joël Séria, qui brode son film autour de trois « scènes de fesses » anthologiques dont on a plus retenu la truculence et la verdeur que la profonde mélancolie. Le désir mâle comme fondement du geste esthétique, c’est le vieux sujet mis au goût libertaire des années 1970, avec autant d’ironie que d’empathie. Parce que Séria n’est pas Bertrand Blier, le machisme va sans gloire; ce qui provoque l’hilarité, c’est la fragilité de l’homme face au corps féminin, qui relève autant des affres de la pulsion que du cliché de l’artiste érotomane (avec Paul Gauguin comme modèle).

Rendre l’origine du monde à qui elle appartient

La dernière scène licencieuse est ainsi la plus drôle et bouleversante. Ivre d’alcool et de peinture, Serin pose sa main sur la cuisse de Marie (Jeanne Goupil), la fille de sa logeuse, qu’il couvait jusqu’alors d’une tranquille affection. S’ensuit un flot de mots incontinents, débordant de sa bouche comme des haïkus vulgaires, tandis qu’il la convainc de dévoiler ses fesses puis son « minou ». Le panoramique vertical vers son entrejambe s’arrête à temps pour laisser place au contrechamp d’un Marielle en transe. « Oh nom de Dieu, quelle merveille! On dirait de la mousse… » 

Tout passe et s’emballe dans son regard, de la piété au délire. « Je bande », lâche-t-il enfin, comme pour dire « Dieu existe« … Quand on sait que tous les tableaux du film sont l’œuvre de Jeanne Goupil, on ne peut se méprendre quant à l’intention de Séria: pousser le mâle-artiste de son piédestal, et rendre l’origine du monde à qui elle appartient.

Les Galettes de Pont-Aven, de Joël Séria (1975) disponible en DVD (TF1)

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