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LA REDAC A CANNES : JOUR 10

  • Trois Couleurs
  • 2016-05-20

Depuis le début du festival, les cadavres et les litres d’hémoglobine déferlent à l’écran. En Compétition, c’est Mademoiselle de Park Chan-Wook, ses pendus et ses doigts coupés qui ont lancé les hostilités. À Un Certain regard, on est tombés nez-à-nez avec un vampire dans The Transfiguration de Michael O’Shea, dans lequel le jeune héros se découvre le besoin vital de siroter du sang humain. Le délire s’est carrément fait carnassier dans Grave de Julia Ducourneau, présenté à la Semaine, qui suit une étudiante bizutée qui passe sans transition du végétarisme au cannibalisme. Autant dire qu’on a regardé ce teen-movie creepy d’un œil avide, en gloussant de plaisir comme des préados devant un film interdit aux moins de 16 ans. Globalement, on se réjouit de voir que cette année, les films de genre se sont infiltrés dans les sélections, eux qui ont longtemps été méprisés par les hauts cercles de la cinéphilie.

Entre hier et ce matin, le sang a particulièrement giclé devant nos yeux, il faut le dire, déjà bien rougis par la fatigue. D’ailleurs, on n’a pas l’impression d’être les seuls à se sentir un peu dead.

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En parlant de mourant, on a assisté aux derniers jours d’un roi de France avec La Mort de Louis XIV, beau film d’Albert Serra présenté Hors Compétition. Un huis clos en chambre royale et en sourdine dans lequel Jean-Pierre Léaud grogne et halète de douleur pour interpréter le Roi Soleil, rongé par la gangrène. Si le film est excellemment interprété (Léaud et Patrick d’Assumçao, qui joue le médecin du roi, sont d’une justesse saisissante) et tire partie d’un éclairage à la bougie digne d’une toile de maître, la vision de la jambe du roi qui noircit progressivement au cours du film, comme un compte-à-rebours, nous a tout de même un peu retourné l’estomac.

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À la Quinzaine, on a continué les festivités macabres en retrouvant un spécialiste du bain de sang, Paul Schrader, (on se souvient du massacre de la dernière scène de Taxi Driver de Martin Scorsese, qu’il a scénarisé). Dog Eat Dog est un film de vieux malfrats drôle, méchant, dingo. C’est l’histoire de trois bad guys (campés par les parfaits Nicolas Cage, Willem Dafoe et Christophe Matthew Cook) qui sortent de prison et font équipe pour organiser un kidnapping. Schrader se demande comment vieillissent les truands : nos trois pieds nickelés paraissent déconnectés, inadaptés à leur époque ; ils réagissent en butant tout le monde. Le film est presque cartoonesque dans sa représentation de la violence – la première séquence tient d’ailleurs du trip hallucinogène. Imaginez : Willem Dafoe dans une maison rose bonbon tapissée d’images de licorne. Complètement défoncé à l’héro, il se met sans ambages à massacrer sa copine et la fille de celle-ci parce qu’il ne supporte pas leurs remontrances liées à sa consommation de porno.

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Un cocktail d’hallucination, de sexe et de morbidité également au cœur du barré The Neon Demon, qui nous a électrisés hier soir. Le jubilatoire nouvel objet arty façonné par Nicolas Winding Refn raille le milieu de la mode à Los Angeles. Jesse (Elle Fanning, très convaincante), jeune fille innocente, naïve et sans attaches, tente de s’y faire une place, sans soupçonner que sa beauté et son magnétisme naturels attireront les jalousies de ses consoeurs et l’amour démesuré d’une maquilleuse (Jena Malone), sa seule alliée dans la profession.

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Bain de sang (au sens le plus littéral du terme), nécrophilie et cannibalisme : le réalisateur danois pousse la provocation à son paroxysme, ce qui lui donne l’occasion idéale de laisser libre court à ses expérimentations formelles. Car, s’il jette un regard ultra cynique sur ce monde de papier glacé, Winding Refn prend aussi un plaisir évident à le filmer, dans des plans d’une beauté plastique ahurissante, éclairés (comme son titre l’indique) au néon et transcendés par une musique électro sombre et chaotique. On en sort avec les mirettes pleines de lumières bleue, blanche, or et rouge sang.

La violence était bel et bien partout. On l’a sentie en se croutant magistralement alors qu’on courait sur la Croisette pour aller à la projection de The Last Face, le film de Sean Penn en Compétition officielle. Réalisé sans effets spéciaux :

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Le film nous a plongés dans un océan d’horreurs, puisqu’il se déroule en grande partie au Liberia, en pleine guerre civile, et qu’il ne nous épargne aucun détail sordide sur les exactions qui y sont commises.

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Visiblement pétri de bonnes intentions, Sean Penn s’est essayé au mélo sur fond d’humanitaire en orchestrant le coup de foudre entre une directrice d’ONG (Charlize Theron) et un chirurgien (Javier Bardem). Le résultat est appuyé, mais pose quelques questions plutôt bien vues sur le sens et la pertinence de telles missions.

 

Bonus psychopathe :

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