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SCÈNE CULTE · « Frances Ha » de Noah Baumbach

  • Léa André-Sarreau
  • 2024-04-04

Dans un noir et blanc très Nouvelle Vague, Noah Baumbach et sa coscénariste et actrice Greta Gerwig orchestrent les tribulations d’une danseuse trentenaire, fâchée avec sa meilleure amie et les préceptes petits-bourgeois. Disponible sur Culturebox et france.tv à partir du 20 avril, ce petit bijou du Mumblecore – ce mouvement du cinéma américain fauché et naturaliste, porté sur les affres sentimentales – file la métaphore de la danse comme allégresse.

LA SCÈNE

Un carton noir pose le décor : 22 Catherine St, Chinatown, New York, 10038. Les premières notes de « Modern Love » de David Bowie démarrent tandis que les artères illuminées de Manhattan et ses immeubles en briques défilent. Indifférente au chaos urbain et à la torpeur des passants, Frances (Greta Gerwig) trottine, exécute des pas chassés, des grands jetés, puis des pirouettes.

L’ANALYSE DE SCÈNE

Frances Ha carbure aux ellipses et aux ruptures de rythme. Noah Baumbach capture ainsi la course folle de son héroïne grâce à un travelling arrière, puis latéral. Mais la fluidité du mouvement est illusoire. La séquence est émaillée de cuts discrets, qui agissent comme des microsauts temporels, des accélérations impatientes. C’est que Frances n’aime pas s’enraciner – elle n’est pas apprentie chorégraphe pour rien. Elle a beau essayer d’avoir les pieds sur terre, son corps gauche tout droit sorti d’une screwball comedy cherche le mouvement, l’apesanteur.

Ici, la métaphore filée de la danse, incongrue, rieuse, est une façon pour le réalisateur de signifier l’arrachement perpétuel de son personnage. De rue en rue, de coloc en coloc, d’échecs en désillusions, Frances se cogne au réel parce qu’elle refuse la plupart des compromis du monde adulte. La tranquillité du couple, la stabilité du job alimentaire ? Très peu pour elle.

Mais alors, après quoi court Frances dans cette joyeuse fuite en avant ? Héroïne des temps modernes délestée de love interest, sorte d’anti-Bridget Jones assumée, Frances cherche à retrouver la seule chose qui vaille la peine : la complicité perdue avec sa meilleure copine, Sophie, celle qui est « une autre version [d’elle-même] ». Le refrain du « Modern Love » de David Bowie, clin d’œil maniériste à une fameuse séquence dansée de Mauvais Sang de Leos Carax (1986), s’éclaire d’un nouveau sens. Il résonne en chœur avec la mise en scène enivrante de Noah Baumbach, pour nous dire qu’un nouvel « amour moderne » est possible, et qu’il prend le visage de l’amitié.

Frances Ha de Noah Baumbach, Memento (1 h 26), disponible à partir du 20 avril, sur Culturebox et france.tv.

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